À cause de l'épidémie de Covid, les cas de tuberculose explosent

Publié le 14 octobre 2021 à 18h37
À cause de l'épidémie de Covid, les cas de tuberculose explosent
Source : Juni Kriswanto / AFP

FLÉAU - À cause de la mobilisation des équipes soignantes sur le front du Covid-19, des difficultés d'accès au soin et du recul des budgets alloués à la lutte contre la maladie, le nombre de cas de tuberculose augmente dangereusement dans le monde, s'inquiète l'OMS.

C'est la première fois en plus de dix ans que les décès liés à la tuberculose repartent à la hausse, alerte l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ce jeudi 14 octobre. En cause, la perturbation des services de santé due à l'épidémie de Covid-19, qui a anéanti des années de lutte contre la tuberculose. Et la situation semble loin de s'améliorer car un nombre croissant de personnes ne savent pas qu'elles souffrent de la maladie, que l'on peut traiter et guérir, s'inquiète l'institut dans son rapport annuel sur la tuberculose qui porte sur 2020. 

Ce serait environ 4,1 millions de personnes souffrant de tuberculose qui n'ont pas été diagnostiquées ou n'ont pas été officiellement déclarées, un chiffre en forte hausse par rapport aux 2,9 millions de 2019. Cette maladie infectieuse est provoquée par une mycobactérie, le bacille tuberculeux, qui se transmet par voie aérienne, touche le plus souvent les poumons et est mortelle si elle n'est pas correctement traitée. 

Une personne contaminée n'est pas nécessairement malade, puisque l'infection peut rester sous forme "latente" dans l'organisme sans apparition de symptôme ni possibilité de contaminer d'autres personnes. La maladie se déclare dans 10% des cas seulement, plusieurs mois voire plusieurs années après la contamination, indique le site du ministère de la Santé. Le risque de contracter l'infection diminue avec le temps et est ainsi particulièrement fort chez les jeunes enfants. 

Autant de décès liés à la tuberculose en 2020 qu'en 2017

Les personnes séropositives sont aussi vulnérables face à cette maladie, puisque "l’infection à VIH constitue le facteur de risque le plus important d’évolution d’une infection par la tuberculose en une tuberculose active", précise le site du Programme commun des Nations unies sur le VIH/sida, appelé aussi Onusida. 

Selon le rapport de l'OMS, il y a eu l'an dernier 214.000 décès dus à la tuberculose parmi les patients séropositif et 1,3 million de décès parmi les autres patients (contre 1,2 million en 2019), contre respectivement 209.000 et 1,2 million en 2019. Soit un total de quelque 1,5 million de morts sur l'année passée, un bilan en hausse par rapport aux 1,4 million de décès en 2019, et qui se calque sur celui de 2017. Un retour en arrière inquiétant pour l'OMS, dont les projections prédisent que le nombre de personnes développant la tuberculose et mourant de cette maladie pourrait être encore "beaucoup plus élevé en 2021 et 2022".

"Ce rapport confirme nos craintes que la perturbation des services de santé essentiels due à la pandémie pourrait commencer à réduire à néant des années de progrès contre la tuberculose", a souligné le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'OMS, dans un communiqué. Et d'ajouter : "Il s'agit d'une nouvelle alarmante qui doit servir de signal d'alerte mondial quant au besoin urgent qu'il y a à investir et innover pour combler les lacunes en matière de diagnostic, de traitement et de soins pour les millions de personnes touchées par cette maladie ancienne mais évitable et traitable."

ARCHIVES - Des souches de la tuberculose vielles de 100 ans exhumées pour combattre la maladieSource : JT 13h WE

Plus d'un million de diagnostics en moins par rapport à 2019

Cette hausse des décès met en péril la stratégie de l'OMS qui a pour objectif de réduire de 90% les morts dues à la maladie et de 80% le taux d'incidence de la tuberculose par rapport à 2015, d'ici 2030. Outre les confinements qui ont compliqué l'accès des patients aux centres de soins, la lutte contre le Covid-19 a aussi monopolisé le personnel soignant ainsi que les ressources techniques et les dépenses tout au long de l'année 2020.

Le nombre de personnes nouvellement diagnostiquées et déclarées tuberculeuses par les autorités a ainsi chuté à 5,8 millions en 2020, contre 7,1 millions en 2019, ce qui représente une baisse de 18% par rapport au niveau de 2012. Les pays où les notifications de cas de contamination à la tuberculose ont le plus chuté entre 2019 et 2020 sont notamment l'Inde, l'Indonésie, les Philippines et la Chine. Aux côtés de 12 autres pays, ils ont représenté 93% de la baisse mondiale totale des notifications.

L'offre de traitements préventifs contre la tuberculose a également souffert : quelque 2,8 millions de personnes y ont eu accès en 2020, 21% de moins que l'année précédente. En outre, le nombre de personnes soignées pour une tuberculose résistante aux médicaments a aussi diminué de 15%, si bien que seule une personne sur trois environ parmi celles qui en ont besoin ont eu accès à ces soins.

Parallèlement, les budgets consacrés au diagnostic, au traitement et à la prévention de la maladie ont aussi reculé à travers le monde, passant de 5,8 milliards de dollars à 5,3 milliards en un an. Soit moins de la moitié de l'objectif mondial fixé à 13 milliards de dollars par an d'ici 2022 pour financer la lutte contre la maladie.

La France comptait 5116 cas déclarés en 2019, soit un taux d’incidence de 7,6 cas pour 100 000 habitants, selon Santé Publique France. Les départements les plus touchés sont l'Île-de-France, Guyane et Mayotte. 


La rédaction de TF1info (avec AFP)

Tout
TF1 Info