Lavage des masques : y a-t-il des alternatives fiables à un passage en machine ?

Publié le 10 mai 2020 à 12h44
Seuls les masques en tissu peuvent faire l'objet d'une réutilisation.
Seuls les masques en tissu peuvent faire l'objet d'une réutilisation. - Source : Illustration by Rike_ via iStock

À LA LOUPE – La généralisation des masques interroge sur la manière de procéder au lavage des modèles grand public en tissu. De nombreux Français souhaiteraient éviter de multiplier les machines, mais la majorité des techniques alternatives sont fortement déconseillées ou inefficaces.

Bientôt obligatoire dans les transports et toujours recommandé à l'extérieur de son domicile, le masque suscite de nombreuses interrogations. Si les recommandations pour les modèles en tissu réutilisables mettent en avant l'importance d'un lavage en machine à 60 degrés pendant au moins trente minutes, cette méthode ne fait pas l'unanimité.

Vous êtes nombreux à avoir contacté notre rédaction via l'adresse alaloupe@tf1.fr pour obtenir des informations sur des méthodes de lavage et de désinfection alternatives, jugées moins contraignantes que des passages en machine. Ces solutions, parfois assez originales, ne sont malheureusement que très peu efficaces de l'avis des spécialistes. Découvrez les principales idées passées en revue.

Un séjour au congélateur

De toutes les méthodes envisagées, il s'agit sans doute de l'une des moins utiles. Les virus, s'ils sont sensibles à la chaleur, peuvent en effet résister au froid. "La congélation, c'est même la manière dont ils sont conservés par les scientifiques pour être étudiés", tranche Bruno Grandbastien, président de la Société française d'hygiène hospitalière (SF2H). Une méthode qui est donc totalement à proscrire.

Faire bouillir un masque dans une casserole

Cette idée, selon le spécialiste, n'est pas forcément à exclure. "Ça pourrait marcher", mais encore faut-il que les masques puissent "résister à des températures de 90 degrés ou plus pendant une durée assez longue". Seuls certains tissus tolèrent en effet de telles chaleurs, à l'instar de cotons très denses. Le risque est également d'endommager les élastiques.

Bruno Grandbastien précise qu'avec cette méthode, comme avec toutes les autres, il est important de ne pas juger uniquement l'efficacité théorique, mais de la coupler avec une mesure du temps de contact elle aussi très importante. Plonger quelques instants seulement dans l'eau bouillante un masque ne sera ainsi pas suffisant. Une recommandation qui s'applique tout autant pour les passages en machine.  

Utiliser la vapeur pour détruire le virus

Plusieurs des méthodes suggérées par les internautes reviennent à utiliser la vapeur. Certains proposent en effet de fixer le masque en suspension au-dessus d'une casserole d'eau bouillante. Une idée qui n'enchante guère les spécialistes : "Il est difficile de contrôler la température et le niveau d’humidité auquel on expose le masque", ont ainsi confié des experts à l'AFP, précisant que pour être véritablement efficace, cette vapeur aurait besoin d'être "sursaturée, c’est-à-dire sous pression, comme dans une cocotte-minute". Difficile à obtenir à la maison, sans parler des risques de brûlures…

Pour Bruno Grandbastien, il faudrait par ailleurs pouvoir s'assurer que toutes les faces du masque auraient été exposées de manière uniforme, ce qui reste compliqué à vérifier. L'utilisation d'un cuit vapeur (présent dans de nombreuses cuisines), séduisante sur le papier car permettant une exposition à une forte chaleur, pose quant à elle d'autres problèmes : "Comme pour un micro-ondes, cela suppose de placer un masque potentiellement contaminé dans un appareil qui a vocation à accueillir ensuite de la nourriture…" Délicat, donc, de le recommander. 

Quelques minutes au micro-ondes

Outre le fait d'utiliser un appareil en lien direct avec les aliments que nous consommons, le micro-ondes peut poser des problèmes notables. Dans de nombreux masques, un fin renfort métallique est en effet ajouté afin de renforcer la rigidité. Le risque d'accident domestique est alors bien réel et un départ de flamme n'est pas à exclure. À oublier.

Le passage dans un four classique

Plusieurs équipes de chercheurs ont travaillé sur l'hypothèse de placer un masque dans un four, à une température de 70 degrés. Ils suggèrent que le laisser trente minutes se révélerait efficace. Problème : les fours dont nous disposons à la maison ne sont pas ceux utilisés pour des tests en laboratoire, et ils font courir d'importants risques d'accidents domestiques, notamment à cause des résistances. Énergivores et pas plus rapides que des machines à laver, les fours traditionnels ne représentent pas une option viable.

Attendre plusieurs jours avant une nouvelle utilisation

La durée de vie du virus ne semblant pas excéder quelques jours, pourquoi ne pas respecter un délai entre plusieurs utilisations ? Le raisonnement s'entend, estime le président de la Société française d'hygiène hospitalière (SF2H), mais Bruno Grandbastien y voit plusieurs limites. "Ce n'est pas très fiable", juge-t-il, "les expérimentations qui indiquent que le virus survit 3 jours au maximum se basent sur un virus nu, observé sur une surface inerte. Nous ne sommes pas dans la même situation qu'avec un masque qui viendrait d'être utilisé."

L'expert souligne par ailleurs que ce procédé pose problème car il ne permet pas de nettoyage. Or, nous expulsons en respirant des particules qui peuvent contenir des fragments de matière organique. Celle-ci sont susceptibles d'abriter elles-aussi le virus et doivent faire l'objet d'un nettoyage. Il est donc possible d'envisager un lavage à basse température suivie d'une période d'attente, mais cela supposerait une capacité d'essorage performante, pour assurer au masque un séchage rapide. Compliqué, et bien moins fiable qu'un passage en machine.

Utiliser de la javel ou un gel hydroalcoolique

Les solutions chimiques peuvent aussi être envisagées, mais se révèlent potentiellement peu adaptées. Le gel hydroalcoolique, rappelle Bruno Grandbastien, "est conçu spécifiquement pour les mains". Il n'est donc pas adapté à un nettoyage de tissu. L'eau de Javel pourrait quant à elle s'envisager, mais elle ne permet pas de détruire les résidus de matière organique… Il faudrait ainsi l'accompagner d'une forme de lavage.

Si la puissance de l'eau de Javel est reconnue, il faut toutefois noter que les risques d'irritation liés à son inhalation sont majeurs, et peuvent causer gènes respiratoires et allergies. Des désagréments qui ne disparaissent qu'après une série de lavages. Sans compter le risque de tâcher ses vêtements lorsque l'on effectue les manipulations. 

L'utilisation d'un fer à repasser

La chaleur d'un fer à repasser est susceptible de détruire le virus. Encore faut-il pouvoir accéder avec précision à tous les plis du masque de manière uniforme, et ce sur chacune des couches. Par ailleurs, il faudrait pour cela avoir recours à une exposition relativement longue à la chaleur du fer, ce qui fait courir le risque d'endommager le tissu et demande manipulations et patience. Cette méthode, peu fiable, est également déconseillée par les spécialistes. 

En résumé

Si certaines idées de lavage et désinfection des masques semblent audacieuses, elles s'avèrent donc la plupart du temps peu ou pas efficaces, et même parfois dangereuses. Les recommandations des autorités de santé restent claires : utiliser sa machine à laver, avec une eau à 60 degrés pendant au moins 30 minutes. 

Cette méthode reste aujourd'hui la plus sûre, mais elle finit (au même titre que les autres) par réduire les capacités de filtration des tissus et de les fragiliser. Pour cette raison, il est donc conseillé de surveiller avec attention l'état des masques et des élastiques. Ces derniers, fragiles, sont susceptibles de se détériorer plus vite que la toile et doivent inciter à une faire preuve d'une vigilance particulière. 

Masques et virus : ce qu'il faut savoirSource : La Matinale LCI

Notez que rien n'oblige à laver les masques seuls dans une machine. Il est tout à fait possible de les mêler à des vêtements, des torchons ou des draps. La seule contrainte sera alors de rassembler des tissus capables de résister à des températures d'au moins 60 degrés.

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Thomas DESZPOT

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