Le couvre-feu avancé à 18h a-t-il déjà fait ses preuves ?

Publié le 16 janvier 2021 à 16h46, mis à jour le 16 janvier 2021 à 18h20

Source : TF1 Info

INCERTITUDES - Sans effet, le couvre-feu avancé à 18h ? La mesure, critiquée mais tout de même étendue à tout le territoire métropolitain, ne semble pas porter ses fruits dans les Alpes-Maritimes, ce qui ne signifie pas pour autant qu'il faut déjà l'enterrer.

"L'expérience des Alpes-Maritimes montre bien que passer de 20h à 18h n'a rien changé." Ces mots sont ceux du président LR de la région Sud-PACA, Renaud Muselier, qui partage son scepticisme quant à l'utilité d'une telle mesure, peu consensuelle mais qui concerne tout le territoire français métropolitain depuis le samedi 16 janvier, 18h. Le seul exemple du département du Sud Est paraît toutefois léger pour tirer des conclusions. À l'heure qu'il est, établir un bilan est difficile malgré l'observation de certains indicateurs.

Un taux d'incidence qui poursuit sa hausse

Si l'on s'en tient au seul taux d'incidence des Alpes-Maritimes, les propos du présent de région ne souffrent aucune contestation. Cet indicateur, qui mesure le nombre de personnes positives au virus pour 100.000 personnes, était de 295 le 4 janvier. Il a progressé, atteignant 341 le 8 janvier puis 456 le 12 janvier. 

Contraignante pour les habitants concernés, à Nice ou à Cannes par exemple, la mesure, qui ne brille pas par son efficacité, doit-elle être abrogée ? Il est encore hasardeux de le dire, et ce pour plusieurs raisons. D'abord parce que le recul manque : "Il faut attendre une quinzaine de jours, [...] 10 jours, ce n'est pas suffisant", assure le président de la Conférence nationale de santé, l'épidémiologiste Emmanuel Rusch. Autre aspect à prendre en considération, le fait que les tendances observées sur le terrain ne sont pas homogènes d'un département à l'autre.

"Les résultats sont assez contrastés", remarque Emmanuel Rusch, qui constate "une forme de stabilisation de l'évolution du taux d'incidence" dans "certains départements", par exemple les Ardennes. Dans le même ordre d'idée, le ministre de la Santé observait une hausse moyenne du taux d'incidence "de 16%, quand les autres ont une augmentation de 43%".  Causalité ou corrélation ? Pour Emmanuel Risch, il est de toute façon "un peu tôt pour dire qu'on a un ralentissement, mais on peut parler de stabilisation". Peut-on lier cette évolution au couvre-feu ? "Je serais bien incapable de le dire", avoue-t-il auprès de France Info. 

L'infectiologue Eric Cua du CHU de Nice, est encore plus méfiant sur l'effet du couvre-feu. "De ce que je vois à l'hôpital de Nice et de ce que je sais des hôpitaux de la région, de Grasse ou d'Antibes, on n'a pas du tout vu les bénéfices de ce couvre-feu à 18h, c'est clair et net", tranche-t-il. Les divergences affichées par les professionnels de santé sur le sujet incitent aujourd'hui à la prudence. Quand l'épidémiologiste Yves Buisson loue "une solution qui a fait ses preuves", sa consœur Catherine Hill décrit sur LCI le couvre-feu avancé à 18h comme une décision qui "ne changera pas grand-chose". 

Si les autorités sanitaires misent sur le fait que l'avancement des horaires du couvre-feu serait susceptible de réduire encore davantage les interactions sociales et donc les contaminations, la patience est pour l'heure de mise pour évaluer efficacement la pertinence de cette décision. Les seuls indicateurs relatifs aux Alpes-Maritimes, dans le rouge, tendent à montrer une absence d'impact, mais le manque de recul et les résultats différents dans d'autres départements sont des éléments à ne pas négliger.

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Thomas DESZPOT

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