Covid-19 : faudra-t-il se faire vacciner tous les ans ?

Publié le 5 novembre 2021 à 13h41
Les spécialistes estiment qu'il ne sera pas nécessaire de multiplier les rappels à l'avenir.
Les spécialistes estiment qu'il ne sera pas nécessaire de multiplier les rappels à l'avenir. - Source : Valery HACHE / AFP

LES VERIFICATEURS AVEC L'INSERM – Chez les vaccinés comme chez les non-vaccinés, la nécessité prochaine d'une 3e dose interroge. Faudra-t-il, à l'avenir, effectuer des rappels très fréquents ? Hautement improbable, aux yeux des spécialistes.

L'injection d'une troisième dose pour les personnes les plus fragiles suscite des questions. Que ce soit au sein de la population qui s'est fait vacciner ou de celle qui rechigne à le faire. Combien de doses seront-elles nécessaires ? Nous dirigeons-nous vers des campagnes régulières de vaccination à l'instar de celles pour la grippe ?

Pour y voir plus clair, LCI a sollicité la chercheuse de l'Inserm et immunologiste Sandrine Sarrazin, évoluant au sein du centre d'Immunologie de Marseille-Luminy. Sauf émergence de nouvelles souches du virus, cette experte indique qu'il ne sera pas utile de multiplier les injections à l'avenir dans le but de garantir aux patients une protection durable.

Moins d'anticorps, mais des cellules "mémoire" bien utiles

Au sein des groupes antivax, il est courant de voir circuler des messages évoquant un "abonnement vaccinal". Après une première injection, les personnes vaccinées seraient ainsi condamnées à une nouvelle piqûre à intervalles réguliers. Côté politique, on note aussi que Florian Philippot agite le spectre d'injections à répétition, avec "2 doses par an à vie". Des discours que Sandrine Sarrazin contredit très largement. Contrairement à certaines idées reçues, elle indique notamment que si le taux d'anticorps présent dans le sang baisse avec le temps jusqu'à disparaître, cela ne signifie pas que nous devenons vulnérables face au virus. 

"Si l'on est protégé sur le long terme, c’est grâce à des cellules 'mémoire' qui viennent de loger dans la moelle osseuse et qui sont capables de re-fabriquer des anticorps. Elles peuvent se remettre en route à tout moment au fil du temps", souligne la chercheuse. Ces cellules, des lymphocytes B à mémoire, permettent de lutter contre une infection bien longtemps après la disparition des premiers anticorps. "C'est pour cela qu'avec la majorité des vaccins, ceux réalisés chez les enfants notamment, il n'est pas nécessaire de multiplier les rappels. Avec la vaccination initiale, souvent 2 injections à quelques mois d’intervalle, nous restons toute notre vie protégée contre la rubéole ou la tuberculose."

Sandrine Sarrazin utilise régulièrement une comparaison très parlante : actuellement, avec une circulation encore intense du virus, "c'est un peu comme si nous roulions à contresens sur l'autoroute. Les chances de croiser le Covid sur notre route restent importantes et il demeure nécessaire de s'en protéger au maximum. Avec nos cellules mémoire, nous sommes déjà bien équipés, elles font en quelque sorte office de ceinture de sécurité. Mais conserver un fort taux d'anticorps s'avère utile, cela revient à utiliser en plus un ABS et des airbags." L'immunologiste note également que présenter de taux d'anticorps élevés présente un autre avantage, celui d'observer leur concentration y compris "au niveau des portes d'entrées du virus", dans les voies respiratoires par exemple. Utile, puisque cela contribue à "réduire la transmission".

Pas besoin de multiples rappels

Lorsque le virus verra sa propagation diminuer, il sera peu opportun de chercher à conserver en permanence d'importants taux d'anticorps. Dès lors, effectuer des rappels à intervalles réguliers n'aura aucun intérêt. La seule question qui se pose "est celle de la durée effective de protection apportée par les vaccins, qui devra être évaluée au fil du temps". Si nécessaire, en l'absence de nouveau variant échappant au vaccin, il n'est pas à exclure qu'un rappel soit programmé au bout de quelques années, à l'instar des doses injectées contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. Autre scénario, tout aussi crédible : celui qu'aucun rappel ne soit nécessaire.

Lorsque l'on évoque l'immunité, Sandrine Sarrazin appelle à se méfier des comparaisons avec la grippe saisonnière, pour laquelle on organise chaque année des campagnes de vaccination. Ce virus en effet, ne revient pas à l'identique d'une année sur l'autre. Des souches nouvelles émergent, contre lesquels il est nécessaire de renouveler notre protection. Le Covid, lui, apparaît plus stable dans le temps, si bien que les différents variants qui ont émergé se sont jusqu'à présent (et par chance) révélés vulnérables face aux vaccins. Quoi qu'il en soit, la vigilance des chercheurs reste de mise. Les probabilités qu'émergent à l'avenir de nouvelles souches, plus résistantes, ne peuvent être exclues. Dès lors, il faudra peut-être dans le futur injecter un nouveau vaccin, et non pas un rappel. Pour contrer une souche différente de celle qui circule actuellement.

En résumé, il apparaît donc très abusif d'affirmer que les personnes vaccinées contre le Covid devront dans le futur subir des injections chaque année, et ce ad vitam æternam. L'injection d'une troisième dose pour les plus fragiles, si elle se justifie aujourd'hui par le besoin d'offrir une protection supplémentaire contre un virus qui circule beaucoup, ne signifie pas que des rappels réguliers seront programmés dans le futur. Si l'épidémie se résorbe et que le Covid circule peu dans les mois et années à venir, compter sur la protection offerte par nos cellules "mémoire" devrait s'avérer largement suffisant pour une large majorité de la population.

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Thomas DESZPOT

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