"Nous avons perdu la maîtrise" de l'épidémie, alerte l'infectiologue Karine Lacombe

Publié le 25 octobre 2020 à 20h38, mis à jour le 26 octobre 2020 à 12h00

Source : Sujet TF1 Info

MISE EN GARDE - Invitée d'En toute franchise sur LCI, l'infectiologue Karine Lacombe estime que la situation épidémique est désormais "hors de contrôle", et qu'un reconfinement serait "la mesure qui aurait le plus d'impact sur la saturation du système de soins".

La France se dirige-t-elle vers un nouveau confinement ? Alors que plus de 52.000 cas ont été enregistrés ce dimanche en France, Karine Lacombe, cheffe du service infectiologie à l'hôpital Saint-Antoine (Paris), s'est montrée "inquiète" quant à la situation épidémique. Contrairement au mois de mars, où un plan blanc avait permis de soulager les hôpitaux de certaines interventions, "il y a toutes les autres pathologies à prendre en charge", en plus des patients Covid-19, a-t-elle rappelé sur LCI. En ce sens, "nous sommes plus inquiets qu'en mars".

La situation est désormais "hors de contrôle", soutient-elle, jugeant "le nombre de tests positifs [...] vraiment énorme". "A Paris, quasiment 20% des personnes dépistées sont positives", tandis que le taux de positivité atteint, ce dimanche, 17% en France, un record. "Actuellement, nous avons perdu la maîtrise" de l'épidémie.

Vers un reconfinement ? "Si on attend, on va souffrir"

Selon elle, le nombre de cas, le plus haut d'Europe, est d'ailleurs particulièrement sous-estimé. "Nous ne serions pas du tout étonnés s'il y avait, en réalité, deux fois plus de cas, puisque tout le monde ne se fait pas dépister, en particulier les personnes asymptomatiques", admet Karine Lacombe. "Elles représentent pourtant un réservoir important du virus, qui circule probablement beaucoup plus que ce que nous pouvons avoir comme reflet avec le dépistage actuel."

Face à la flambée des contaminations, les hôpitaux voient désormais débarquer de plus en plus de patients, ce qui laisse craindre une saturation dans les semaines à venir. Interrogée par Amélie Carrouër sur la possibilité d'un reconfinement pour éviter un scénario catastrophe, étape déjà franchie par plusieurs pays européens, Karine Lacombe n'a pas exclu cette possibilité, bien au contraire. "Nous allons voir comment résiste le système de soins", temporise-t-elle. "Mais en l'état, ce serait probablement la mesure qui aurait le plus d'impact sur la saturation du système de soins. Si on attend, on va souffrir."

"Si on ne veut pas passer Noël en confinement, il va falloir prendre des mesures"

Il pourrait d'ailleurs s'agir d'une condition indispensable pour que les fêtes de fin d'année se déroulent dans les meilleures conditions. Actuellement, "nous sommes mal partis pour le mois de décembre", poursuit Karine Lacombe, selon qui la fin de semaine sera déterminante pour sauver Noël. "Il faudra regarder l'impact du couvre-feu, que l'on observera peut-être en fin de semaine prochaine. Si les indicateurs sont encore noirs, alors il faudra prendre des mesures fortes. Autrement, on ne sauvera pas Noël. Si on ne veut pas passer Noël en confinement, il va falloir prendre des mesures avant."

"Il va falloir prendre des mesures fortes pour sauver Noël"Source : TF1 Info

L'infectiologue regrette également que cette deuxième vague intervienne suite au recul du télétravail à la rentrée. "Sur le télétravail, nous avons été assez mauvais", regrette-t-elle. "À partir de septembre, quasiment tout le monde est retourné au travail, le télétravail a été oublié. C'est forcément quelque chose qui a impacté l'épidémie." Jusqu'à présent, le gouvernement, rétif à toute forme de coercition, s'est toujours refusé à imposer le télétravail aux entreprises, laissant cette décision se gérer entre directions et représentants des salariés. Il a également fallu attendre le mois de septembre pour que le port du masque y soit obligatoire.

Les enfants de 6 à 11 ans "doivent porter le masque"

Afin de réduire les contaminations, Karine Lacombe plaide désormais pour un usage plus large du masque, y compris pour les enfants de moins de 11 ans, jusqu'ici exemptés. "Même s'ils sont peu malades et contaminent peut-être moins que d'autres catégories de la population, les enfants demeurent un réservoir du virus", prévient la cheffe de service. "Si nous devons agir sur tous les facteurs qui impactent la dynamique de l'épidémie, alors les enfants de 6 à 11 ans sont une tranche de population sur laquelle il faut agir."

En ce sens, elle demande que le masque devienne obligatoire pour les moins de 11 ans, mais aussi "que le protocole à l'école puisse être appliqué de façon plus stricte, que l'on aère régulièrement les espaces de vie commune", et que l'organisation dans les cantines "soit revue" avant la rentrée.


Idèr NABILI

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