Réouverture des terrasses : les parois en plexiglas sont-elles contre-productives ?

MM
Publié le 18 mai 2021 à 12h49, mis à jour le 19 mai 2021 à 8h44

Source : TF1 Info

ÉCLAIRAGE - Pour s'affranchir de la jauge à 50% en terrasses, dès leur réouverture le 19 mai, les établissements de moins de dix tables sont tenus d'installer entre elles des séparations, comme des parois en plexiglas. Utile ?

Gel hydroalcoolique, masques... Depuis plus d'un an, les Français ont appris à vivre avec tout un panel de nouveaux objets et produits destinés à limiter la propagation du Covid-19. Parmi ceux-ci, les parois en plexiglas, qui ont envahi les caisses de supermarchés, les VTC et, à partir du 19 mai, une partie des terrasses. 20 jours plus tard, le 9 juin, ce devrait aussi être le cas à l'intérieur des bars et restaurants, qui pourront de nouveau servir en salles.

L'exécutif encourage même à recourir à ce dispositif : il a annoncé mercredi 12 mai, que les restaurants ayant une terrasse de moins de dix tables n'auront pas à respecter de jauge de 50% s'ils placent des paravents ou du plexiglas entre elles. Une mesure qui devra s'ajouter à l'aération des lieux, ou au recours à des menus sans contact, par exemple à l'aide de QR codes.

Mais la communauté scientifique est divisée sur le recours à ce type de séparations, que certains jugent même contre-productives. Bruno Andreotti, physicien et professeur à l'École Normale Supérieure, estime ainsi sur Franceinfo que ces murs artificiels "non seulement ne protègent pas, mais empêchent la ventilation". "C'est l'archétype de la mauvaise idée : on a l'impression qu'on est protégé, alors qu'on ne l'est pas", poursuit le spécialiste, qui étudie les transmissions par aérosols.

Des séparations "dangereuses" concernant les fines particules

Un point de vue corroboré par une étude menée aux États-Unis en milieu scolaire, et publiée fin avril dernier dans Sciences Mag. Elle conclut que l'installation de barrières entre les élèves contribuerait à la circulation du virus. "Ces parois perturbent les écoulements d’air, risquant même de provoquer des zones mortes où les particules fines restent. Elles ne sont pas bloquées par ces barrières en plastique", explique ainsi au Parisien Francis Allard, professeur émérite à l’université de La Rochelle. Pour ce spécialiste des flux d’air, les parois en plexiglas "peuvent être utiles lorsqu'on postillonne ou éternue", mais deviennent plus "dangereuses" en ce qui concerne les fines particules en suspension, celles émises notamment par la simple respiration. 

Car les parois de séparation, en bloquant partiellement la circulation de l'air, entraînent l'accumulation de ces fines particules. "Celles-ci peuvent rester dans l’air pendant plusieurs heures et contournent les barrières", assure le spécialiste. Francis Allard évoque également "un risque de contamination par surface, si ces particules se déposent sur des objets, par exemple ces plaques en plexiglas"

L'un des auteurs de l'étude américaine en milieu scolaire évoque un autre risque lié à l'installation de barrières : "Cela peut mener à des changements de comportements. Si le professeur veut interagir avec l'étudiant, il peut être contraint de se rapprocher de lui, dans cet espace réduit", souligne sur France Info Justin Lessler, professeur d'épidémiologie à l'université Johns Hopkins. "Cela peut aussi amener à une pratique moins rigoureuse des autres mesures barrières, comme le port du masque". 

De son côté, Francis Allard nuance toutefois ces risques pour ce qui est des terrasses. Là, les parois pourront "être utiles" car "les gens n’auront pas de masques, vont boire, parler, rigoler. Cela viendra en complément des distances entre les tables et de l’aération naturelle. Il y a aussi un aspect psychologique".


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