"On me disait que j'étais un peu chochotte" : atteinte d'endométriose, elle raconte la maladie

Publié le 11 mars 2016 à 16h51, mis à jour le 30 novembre 2017 à 16h52
"On me disait que j'étais un peu chochotte" : atteinte d'endométriose, elle raconte la maladie
Source : Thinkstock/Staras

TÉMOIGNAGE - Maladie gynécologique qui touche une femme sur dix, douloureuse et mal diagnostiquée, l'endométriose est la première cause d'infertilité féminine. La femme dont nous avons recueilli le témoignage a dû attendre 8 ans avant de savoir de quel mal elle souffrait. Elle nous raconte ses douleurs, le manque d'écoute et d'intérêt du corps médical, puis la difficulté d'avoir un enfant.

L'endométriose touche une femme sur dix. Maladie extrêmement douloureuse, cause d'infertilité, elle est souvent mal connue et mal diagnostiquée. Pour comprendre ce que signifie concrétement cette maladie, encore taboue, LCI a recueilli le témoignage d'E., une femme d'une trentaine d'années.

Vivre avec la douleur

"J'ai été réglée vers 15/16 ans. Dès le départ, j'ai eu des règles douloureuses et abondantes. Puis la douleur a augmenté avec l'âge. Je restais allongée, pliée de douleur. J'ai commencé à m'en plaindre auprès de gynécologues à partir de 25 ans. Chaque mois, le premier jour de mes règles, la douleur était en effet telle que je tombais dans les pommes. Résultat : je ne pouvais pas travailler les deux premiers jours. Pour les médecins, ce n'était pas dramatique de louper deux jours de travail par mois.

Pour calmer les douleurs, on m'a toujours prescrit du paracétamol codéiné. J'avais aussi recours à quelques remèdes de grand-mère, comme placer une bouillotte sur mon ventre."

Les relations avec le corps médical

"Quand je me plaignais auprès des gynécologues, ils me répondaient que certaines femmes avaient de la chance d'avoir des règles indolores, et que d'autres non. J'ai souvent déménagé, je changeais donc régulièrement de gynécologue et à chaque fois on me servait le même discours. On me disait que j'étais un peu chochotte.

Mes symptômes étaient clairs, mais personne ne les a pris au sérieux. L'une des seules façons de déceler la maladie est de passer une IRM. Mais cela est coûteux. Des médecins m'ont déjà dit qu'on ne pouvait pas faire passer une IRM à chaque patiente qui se plaint de règles douloureuses.

Lorsque j'ai été diagnostiquée, j'ai été très en colère puisque je m'étais plainte tous les ans face à un corps médical sourd. On vous apprend alors que vous ne pourrez certainement pas avoir d'enfants. Tout ça parce qu'il est trop onéreux de faire passer une IRM à des jeunes femmes qui ont mal quelques jours par mois !

Le diagnostic

"Comme les symptômes sont les mêmes que ceux des règles douloureuses, le diagnostic intervient souvent tard. Dans mon cas, j'ai donc dû attendre 8 ans. J'ai su que j'étais atteinte d'endométriose à 33 ans. Le diagnostic tombe généralement lorsque les couples essayent d'avoir un enfant puisque l'endométriose est une maladie qui provoque l'infertilité (ndlr : elle joue sur l'ovulation, la qualité des ovocytes et la nidation).

Lorsque j'ai emménagé à Grenoble avec mon mari, j'ai donc une nouvelle fois changé de praticien. Nous essayions d'avoir des enfants et nous n'y arrivions pas. Je suis alors tombée sur le premier gynéco qui m'a dit qu'il n'était pas normal que je tombe dans les pommes le premier jour de mes règles. Une simple échographie a été suffisante pour détecter ma maladie, qui était à un stade avancé. Il y a quatre stades dans l'évolution de l'endométriose, j'étais au 4.

L'opération

"Après le diagnostic, je suis allée voir plusieurs médecins et j'ai finalement été opérée. L'opération permet d'enlever les lésions de l'endométriose et d'augmenter un peu le niveau de fertilité, qui ne pourra toutefois jamais être égal à celui d'une femme normale. L'opération a été suivie d'un traitement hormonal pour me mettre en pré-ménopause et stopper mes règles.

Après l'opération, j'ai de nouveau eu des règles, non douloureuses. Alors que je m'étais habituée à la douleur, j'ai passé plusieurs mois avec zéro douleur, et j'ai compris ce que c'était que d'avoir des règles normales. Je savais que la maladie était toujours là, mais je n'appréhendais plus mes règles."

La difficulté de devenir maman

"Si l'opération augmente les chances de grossesse naturelle, les médecins m'ont cependant orienté vers la fécondation in-vitro (FIV). Environ un an après l'opération, nous avons commencé les inséminations. Après plusieurs FIV, nous avons eu le plaisir, avec mon mari, d'accueillir une petite fille qui a aujourd'hui 15 mois. Nous avons eu beaucoup de chance que cela marche, que la maladie ne m'empêche pas de devenir maman. Aujourd'hui j'ai débuté de nouvelles FIV pour essayer d'avoir un deuxième enfant."

Quel futur ?

"Puisque la maladie ne disparaît jamais vraiment, à plus long terme, je sais que deux solutions s'offrent à moi : prendre un traitement pour bloquer mes règles ou subir une ablation de l'utérus. Personne ne peut savoir de quel traitement j'hériterai puisque d'une patiente à une autre, les stratégies thérapeutiques appliquées sont très différentes. Pour l'instant je ne pense pas trop au futur, même si je préférerais ne pas subir une ablation de l'utérus."

De l'importance de parler de cette maladie

"Finalement, autour de moi, je connais plein de personnes touchées par l'endométriose. Mais c'est une maladie personnelle, intime, dont personne ne parle. Si elle était moins taboue, cela aiderait les gens à savoir."


Justine FAURE

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