Face à la progression du variant Delta, une impression de déjà-vu

Publié le 23 juin 2021 à 18h52

Source : TF1 Info

BIS REPETITA - Si l'embellie se confirme au niveau national, la progression du variant Delta sur l'ensemble du territoire, et ailleurs, fait déjà planer la menace d'une quatrième vague. Une situation qui n'est pas sans rappeler celle de l'hiver dernier, lorsque le variant Alpha avait redistribué les cartes.

Doit-on s'attendre prochainement en France à une flambée de cas de Covid-19 liés au variant Delta ? Cette nouvelle souche  va-t-elle se propager de la même manière qu'au Royaume-Uni ou à Lisbonne ? S'il est encore trop tôt pour le dire, l'expérience de l'automne et de l'hiver derniers s'est révélée riche d'enseignements sur la compétition entre variants et son impact sur la reprise épidémique.

À l'époque, c’est le variant Alpha, alors encore appelé "britannique" qui avait rapidement pris le dessus sur la souche historique du virus, outre-Manche, puis progressivement dans le reste de l’Europe et ailleurs, provoquant des flambées épidémiques puis l'émergence de nouvelles vagues. Retour sur les similitudes entre cette séquence de l'histoire de la pandémie et celle qui semble être en train de se profiler.

Une progression rapide d'un territoire à l'autre

Apparu en septembre outre-Manche, le variant britannique, plus contagieux, n'avait mis que quelques semaines avant de s’y imposer. C'est en décembre que sa propagation avait toutefois connu une accélération en Europe, avec un premier cas détecté en Italie le 20 décembre puis un premier cas en France au lendemain de Noël ainsi que quatre premiers cas en Espagne dans la foulée. Très rapidement, des premiers "clusters à risques" de ce variant, baptisé "VOC 202012/01" avaient été détectés dans l'Hexagone, notamment en Bretagne et en Ile-de-France. Au point de mettre les autorités en alerte. Un nouveau confinement "deviendrait probablement une nécessité absolue" si la circulation du variant anglais augmentait "de façon sensible" et que "nous devions suivre une trajectoire à l'anglaise", mettait ainsi en garde Olivier Véran le 21 janvier devant la Commission des lois du Sénat. "Quand je parle d'une course contre la montre, je pèse mes mots. (...) Je parle aussi en jours."

Des mots qui font écho à ceux prononcés aujourd'hui par le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal sur BFMTV-RMC concernant le variant Delta. Appelant à une "vigilance absolue" pour ne pas que l'épidémie reparte, il a estimé sur le fait que ce variant également connu comme "variant indien", "doit nous préoccuper". Et d'insister : "Il faut être très vigilant". Les premiers cas de cette souche ont pour rappel été identifiés fin avril sur le sol français, à savoir trois en Nouvelle-Aquitaine et deux dans les Bouches-du-Rhône. Aujourd'hui, il représente "entre 9 et 10%" des nouveaux cas positifs en France, marquant une forte progression par rapport à la semaine dernière, a indiqué Gabriel Attal. Mardi dernier, le ministre de la Santé Olivier Véran avait évoqué une fourchette de 2% à 4% des cas dus au variant Delta, à partir des données de criblage des tests positifs. 

À titre de repère, Public Health England avait annoncé avoir identifié 73 cas de Covid-19 associés au variant indien en Angleterre mi-avril. Quelques jours plus tard Matt Hancock, ministre de la Santé britannique, faisait déjà état de 103 cas associés au variant indien, signe d'une circulation active de ce variant sur ce territoire.

... jusqu'à ce qu'une souche chasse l'autre

Selon le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), le variant Delta devrait représenter 90% des nouveaux cas dans l'UE d'ici fin août. "Il est très probable que le variant Delta circule largement pendant l'été, en particulier chez les jeunes qui ne sont pas ciblés par la vaccination", a ainsi averti Andrea Ammon, la directrice de l'agence européenne des maladies, en appelant à la vigilance. Si la souche Alpha détectée au Royaume-Uni reste actuellement prédominante dans la région, les modélisations de l'agence européenne prévoient que la souche Delta représentera 70% des nouvelles infections dans l'UE dès début août, précise le centre dans une note. Son avantage compétitif sur les autres variants lui vaut d'ailleurs d'avoir déjà détrôné la souche britannique outre-Manche où est donc désormais majoritaire parmi les cas recensés, et même à l’origine d’une reprise de l’épidémie. 

Là encore, ce scénario n'est pas sans rappeler celui de l'hiver dernier. Pour rappel, dès début janvier, l’OMS avait averti que la souche Alpha "pourrait progressivement remplacer les autres en circulation" dans la zone Europe, "comme observé au Royaume-Uni et de plus en plus au Danemark". Quelques jours plus tard, l'Inserm avait abondé en ce sens dans un rapport, estimant que le variant britannique représentant 1,4% des contaminations détectées en France lors de la première semaine de janvier, deviendrait dominant "entre fin février et mi-mars". Effectivement, au 5 mars, le variant britannique représentait 64,7% des cas en France devant la souche classique (22,1%). Mi-mars, débutait en France la fameuse "troisième vague" dont le pic a été atteint entre le 8 et le 12 avril, soit environ une semaine après le début d'un troisième confinement en France.

Si le profil du variant Delta préoccupe à ce point aujourd'hui, c'est que l'on sait maintenant qu'il est plus contagieux que le variant Alpha, lui-même déjà bien plus transmissible que la souche originelle du Covid-19 et à l'origine de nouvelles vagues épidémiques à travers le globe. "On voit ce qui se passe au Royaume-Uni, où il y a une hausse continue des cas depuis plusieurs semaines (...). On voit que ça peut aller très vite", concède ce mercredi Gabriel Attal pour BFMTV/RMC. 

Les clusters Delta déjà identifiés ne sont que "la partie émergée de l'iceberg", analysait pour sa part l'épidémiologiste Pascal Crépey il y a peu pour l'AFP. "Si on détecte ce variant sans liens avec l'étranger, cela indique qu'il y a peut-être un début de circulation sur le territoire". Le variant Alpha a démarré de façon similaire : "On en avait moins de 1% en janvier et aujourd'hui il est largement dominant". Interrogé par Ouest-France, Arnaud Fontanet, chercheur à l'Institut Pasteur et au Cnam, estime ainsi probable qu'"à la rentrée prochaine, nous soyons dans la situation que connaît le Royaume-Uni actuellement". 


Audrey LE GUELLEC

Tout
TF1 Info