Ces travailleurs que la crise du Covid a fait basculer dans la pauvreté

par La rédaction de TF1 avec Antoine Rondel
Publié le 25 octobre 2020 à 0h00

Source : JT 20h WE

CRISE SOCIALE - Entrepreneurs, intérimaires, agentes d'entretien... Depuis le début de la crise sanitaire, de nombreux travailleurs basculent dans la précarité. Une situation inquiétante marquée par l'explosion des demandes de RSA. TF1 est allé constater la situation dans le Loir-et-Cher.

C'était au début du mois d'octobre. Plus de six mois après le début du confinement, un collectif d'associations de lutte contre la pauvreté secouait le cocotier : en France, la crise économique née de la pandémie a fait basculer un million de personnes dans la pauvreté. 

Parmi elles, Pascal Rey. Professionnel dans l'événementiel depuis 22 ans, ce chef d'entreprise contemple son matériel entreposé dans les locaux de sa société : les enceintes et les retours n'ont pas servi depuis des mois. "Il n'y a rien, pratiquement rien dehors. C'est un peu la catastrophe, on est complètement à l'arrêt". L'avenir immédiat ne s'annonce pas moins morose. Des prestations prévues pour novembre 2021 ont été supprimées : "Les clients sont frileux, ils ne savent pas s'il y aura du public, si les gens seront au rendez-vous".

Pour le soutenir devant cette inactivité forcée, Pascal Rey a reçu 1500 euros d'aide de l'Etat. Six de ses huit employés sont au chômage partiel. Lui ne se paie plus depuis mars. Dans cette spirale infernale, pas de prêt garanti pour lui de la part des banques. "Elles nous demandent d'être caution personnelle, d'engager nos biens personnels. Si demain, ma structure est en cessation de paiement, ma vie complète s'effondre". A 48 ans, Pascal raconte son histoire sobrement, mais bien tôt, il se détourne de la caméra, demande pardon, et s'effondre. Depuis le début de la crise, il a perdu 10 kilos, et sa tension est à 18.

Le secteur de l'événementiel, que le couvre-feu décidé en octobre met au supplice, est l'un des plus affectés par cette crise. Dans le Loir-et-Cher, l'autre secteur touché de plein fouet, c'est l'aéronautique, qui fait vivre de nombreuses petites communes. Exemple à Saint-Julien-de-Chedon, 756 âmes, où le sous-traitant Daer Aerospace, qui fait vivre 30 familles, licencie tous ses intérimaires. 

Résultat, tous les indicateurs de pauvreté sont au rouge. "De septembre 2019 à septmebre 2020, on a 721 bénéficiaires de plus du RSA, plus de 11%, c'est une situation très inquiétante", relève le président du département Nicolas Perruchot. Pour y faire face, le budget départemental a augmenté de 10%. "Un tiers de nos allocataires sont des femmes seules avec enfants. Et il y a les jeunes qui font de l'intéim, qui se retrouvent de fait sans emploi et sans possibilité d'en avoir."

Cet accroissement spectaculaire de la pauvreté, Danièle Royer-Bigache le voit de près, elle qui distribue l'aide alimentaire du Secours populaire depuis 25 ans. "Ouais, ouais", il y a beaucoup de monde en plus, nous confirme-t-elle entre deux distributions de paquets de couches. "On a augmenté de 30%" les dons, précise-t-elle derrière ses lunettes.

Parmi ceux qui demandent de l'aide, il y a Antoine, aide soignant, à la santé trop fragile pour se confronter au virus. "J'aurais bien aimé aider les collègues face au virus, mais j'ai peur pour moi, s'il m'arrive quelque chose." Il élève seul son enfant, âgé de neuf ans. Ses deux sœurs aussi font la queue, elles sont agentes d'entretien. Un poste de dépenses qui ne fait pas long feu à l'heure du covid, où les entreprises se sont lancées en quête d'économies. "Je voudrais qu'ils me donnent plus d'heures, mais c'est pas possible", dit l'une d'elle. Alors, face à la baisse des ressources, "on met toute honte de côté. Si nos enfants ils ont besoin de manger, et ben on va leur chercher à manger."

En 25 ans de distribution, Danièle n'a "absolument pas" connu pareille affluence. "On n'a jamais connu aussi fort". A l'échelle nationale, le Secours populaire dit même que la France n'a pas connu pareille précarité depuis la Seconde guerre mondiale. Et craint, à l'instar des autres associations, que ce ne sont pas les aides exceptionnelles annoncées par le gouvernement qui vont enrayer le problème.


La rédaction de TF1 avec Antoine Rondel

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