"Grève illégale" ou droit de retrait : que risquent les cheminots ?

Publié le 21 octobre 2019 à 6h48

Source : JT 20h WE

MOUVEMENT SOCIAL - Selon les syndicats, les cheminots qui ont refusé de prendre leur poste depuis le 18 octobre sont dans la légalité. Pour la direction de la SNCF, il s'agit d'une grève illégale. Si tel est le cas, que risquent les agents de la compagnie ferroviaire ?

Qui dit vrai ? La direction de la SNCF conteste l'utilisation du droit de retrait par les cheminots et parle de grève illégale. Les syndicats, eux, estiment que les cheminots qui ont refusé de prendre leur poste ce week-end, sont dans la légalité. Les conditions du droit de retrait ont-elles été bien réunies ? Quelles sanctions peuvent être décidées par la direction ? Que risquent les agents qui auraient détourné cette disposition du code du travail ?

Les conditions du droit de retrait ont-elles été bien réunies ?

L'article L.4131-1 du Code du travail énonce que "le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection". A noter que le droit de retrait, contrairement au droit de grève, ne nécessite pas de déposer de préavis et n'entraîne pas de retenue sur salaire. Ce qui s'est donc passé depuis le 18 octobre.

Selon Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit du travail à l'Université Paris-Sorbonne, ce n'est pas le cas ici. "Je pense qu'il y a abus parce qu'on ne peut pas prétendre que, suite à un accident l'ensemble des cheminots de ce pays puissent se retirer et penser que pour eux-même, il y a un danger grave et imminent", explique le juriste. En 2003 et 2017, la Cour de cassation avait affirmé que le droit de retrait devait être limité géographiquement et dans le temps. 

Quelles sanctions peuvent être décidées par la direction ?

Les sanctions pouvant être décidées par la direction peuvent être disciplinaires : un avertissement, un blâme ou une mise à pied. "Sur plusieurs milliers de personnes, c'est extrêmement difficile", explique Jean-Emmanuel Ray. Selon le juriste, "la SNCF se rabattra sur la mesure qu'elle prend beaucoup plus facilement, une mesure contractuelle : il n'y a pas de travail, il n'y a pas de salaire." 

Interrogé dans la soirée du dimanche 20 octobre sur LCI, Guillaume Pépy, le président de la SNCF, a annoncé que des mesures allaient être prises tant sur le plan de la sécurité des agents que sur les salaires de ceux qui avaient exercé leur droit de retrait. "Je ne raisonne pas en terme de sanctions. Ce que je cherche, c'est que le service public soit de retour le plus vite possible.  Celles et ceux qui ont exercé un droit de retrait, alors qu'il n'y avait pas de danger grave et immédiat, il y a des retenues sur salaires. Et ça, c'est la loi", a-t-il déclaré. 

Que risquent les agents qui auraient détourné cette disposition du code du travail ?

Des lettres de mise en demeure ont pour l'instant été envoyées par la direction à des cheminots qui ne sont pas allés travailler. Des menaces qui ont pour objectif de faire cesser la mobilisation. "Je ne pense pas que quiconque ait intérêt à porter devant les tribunaux de façon durable ce genre de situation. Mais on est vraiment dans un moment de bras de fer et dans un moment de dissuasion de la part du gouvernement et de la direction de la SNCF", explique Gilles Dansart, journaliste spécialiste du ferroviaire.


La rédaction de TF1info

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