C'est une première juridique, qui pourrait avoir de lourdes conséquences dans le milieu des livreurs à vélo. Dans un arrêt rendu ce mercredi, la Cour de cassation indique qu'un coursier à vélo travaillant pour une plateforme web doit être considéré comme un salarié, sous certaines conditions. Cette décision concerne le cas d'un salarié de la société Take Eat Easy - qui a déposé le bilan depuis le début de l'affaire -, mais elle pourrait bien faire jurisprudence. Les entreprises du secteur (Deliveroo, Uber Eats...) ont en effet majoritairement toutes opté pour des "partenariats" avec des auto-entrepreneurs plutôt que des contrats de travail.
"Le lien de subordination est caractérisé"
Retour sur l'affaire : le livreur en question avait saisi les prud'hommes en avril 2016 pour demander une requalification de sa relation contractuelle avec Take Eat Easy en contrat de travail. Un an plus tard, la cour d'appel de Paris avait estimé que "le coursier n'était lié à la plateforme numérique par aucun lien d'exclusivité ou de non-concurrence et qu'il restait libre chaque semaine de déterminer lui-même les plages horaires au cours desquelles il souhaitait travailler ou de n'en sélectionner aucune s'il ne souhaitait pas travailler". Elle avait donc débouté le coursier.
Ce mercredi, la Cour de cassation a vu l'affaire différemment. "Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné", explique-t-elle dans l'arrêt. Or, la plateforme et l'application disposaient d'un système de géolocalisation permettant à l'entreprise de suivre en temps réel la position du coursier et d'exercer un système de bonus/malus.
Concrètement, des bonus étaient versés aux livreurs qui dépassaient la moyenne kilométrique de ses confrères. A l'inverse, des pénalités sanctionnaient les temps de livraison trop longs ou les refus de faire une course. Les sanctions pouvaient même aller jusqu'à une exclusion. Ces pouvoirs de sanction mais aussi de direction et de contrôle de l’exécution de la prestation établissent de fait un lien de subordination entre Take Eat Easy et son livreur, ce qui implique un contrat de travail.
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"Une décision très importante"
La Cour de cassation a donc cassé l'arrêt rendu rendu le 20 avril 2017 par la cour d'appel de Paris et ordonné un nouveau procès en appel. "Cet arrêt a le mérite de dire les choses clairement : il n'y a pas antinomie entre contrat de travail et travailleurs des plateformes", a estimé Manuela Grévy, avocate du livreur et de la CGT, auprès de nos confrères de l'AFP.
"C'est une décision très importante", a réagi Gilles Joureau, avocat qui a défendu aux prud'hommes une douzaine de coursiers de Take Eat Easy, tous déboutés. Pour lui, "cet arrêt couronne un long combat pour la reconnaissance du lien de subordination". "C'est bien que la Cour de cassation tranche enfin ces questions", a également salué Me Kevin Mention, qui conseille aux prud'hommes une centaine d'anciens livreurs Take Eat Easy, "sans issue favorable" pour l'instant. Il accompagne également la plainte au pénal déposée contre Take Eat Easy par 119 livreurs pour travail illégal et dissimulé.
Cette décision pourrait en effet être favorable à nombre de leurs clients. Elle remet en tout cas en question le modèle économique des entreprises de livraison par coursier. Si Take Eat Easy a mis la clé sous la porte en août 2016 - mettant sur le carreau 2500 personnes en France -, d'autres sociétés ont du souci à se faire, à l'image de Deliveroo ou Uber Eats.
La rédaction de LCI
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