VERRE TREMPÉ - Le spécialiste iconique de la verrerie est en redressement judiciaire, conséquence de la crise sanitaire, mais aussi d'un enchaînement de problèmes industriels. Mais l'entreprise devrait pouvoir trouver un repreneur.
Plus qu'une marque, en France, Duralex est une icône. Un repère générationnel, un logo gravé dans l'inconscient collectif comme il l'est au fond de chaque verre, un symbole du design industriel de l'après-guerre, a l'égal peut-être de la DS, du stylo Bic, ou de la cocotte-minute SEB.
Difficile d'être passé au travers : si vous avez un jour fréquenté la cantine d'une école, vous avez toutes les chances d'avoir tenu en main ces verres dont les formes ont traversé les modes depuis 75 ans, vendus partout, jusqu'à la boutique du Musée d'Art Moderne de New-York... et celle de l'Élysée. De quoi donner à la marque une empreinte sans rapport avec sa taille réelle, celle d'une PME de 250 personnes. De quoi expliquer aussi que l'annonce des difficultés de l'entreprise ait fait dresser l'oreille bien au-delà de la sphère économique ou politique.
Un "Made in France" résolu, mais fragile
La bonne nouvelle, c'est que Duralex n'est ni Bridgestone, ni Nokia, la procédure en cours ne préfigure ni d'une délocalisation, ni des conséquences économiques d'une concurrence bon marché. Ce qui mène Duralex jusqu'au Tribunal de Commerce, c'est en fait la conjonction de l'impondérable, et de l'imprévisible. Imprévisible, la crise sanitaire, qui a non seulement plombé les ventes et même la capacité logistique à exporter, particulièrement vers l'Asie. Cité dans Les Échos, le président de l'entreprise, Antoine Ioannidès, explique : "Nous vendons dans une centaines de pays dans le monde, (...) et nous avons de ce fait perdu plus de la moitié de notre chiffre d'affaires."
Impondérable lui, l'enchaînement depuis 2017 de problèmes techniques lourds dans son usine de La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret), après des défauts découverts dans un nouveau four installé à grands frais, qui ont contraint les capacités de production de l'entreprise et plombé ses comptes. Les assurances pourraient rembourser, mais pas à temps pour combler le trou dans les comptes de l'entreprise.
Ce qui pourrait sauver Duralex, c'est qu'elle se cherchait un repreneur avant même la crise sanitaire. À 70 et 74 ans respectivement, les deux dirigeants actuels se disent prêts à passer la main, et évoquaient il y a quelques mois l'offre d'une entreprise française, sans la nommer. Il pourrait s'agir de Pyrex, l'autre Français du verre trempé, mais qui ne serait plus seul sur les rangs.
Pour s'assurer du maintien du site, à Bercy, on se dit mobilisé, mais confiant. Dans une déclaration à l'AFP, Agnès Pannier-Runacher, Ministre déléguée chargée de l'industrie, note la "renommée internationale" de la marque, et se veut optimiste pour l'avenir. "L'ouverture d'une procédure collective va permettre de rendre visibles des projets de reprise qui existent aujourd'hui", assure-t-elle, "nous sommes tous convaincus qu'il existe un bel avenir pour cette entreprise". Incassable, vous dit-on.