Accueil de migrants chez soi : les 5 conseils pour que cela se passe bien

Publié le 9 septembre 2015 à 12h43, mis à jour le 19 décembre 2016 à 13h48
Accueil de migrants chez soi : les 5 conseils pour que cela se passe bien

SOLIDARITÉ – Le Service jésuite des réfugiés propose depuis plusieurs années à des particuliers d'héberger de manière temporaire des demandeurs d'asile. Alors que ce derniers jours, beaucoup de Français ont manifesté le souhait de faire de même, son directeur Paul de Montgolfier nous explique comment l'association fait en sorte pour que cette expérience se passe bien.

Chez Jésuites Réfugiés Services (JRS), on se réjouit du nouvel élan de solidarité autour des migrants. Mais depuis l'onde de choc provoquée par la photo du petit Aylan, retrouvé mort noyé sur une plage turque, le standard est saturé. Au point qu'un CDD de trois mois va être embauché pour voir comment répondre à tous les particuliers s'étant manifestés pour héberger un réfugié à leur domicile. Car on sait bien, au sein de cette association catholique, qu'accueillir des demandeurs d'asile chez soi ne s'improvise pas. En six ans, ils sont "entre 1200 et 1500" à avoir passé un certain temps dans une famille française grâce au projet "Welcome" de JRS France, selon son directeur Paul de Montgolfier. Ce prêtre nous explique comment son association, avec son réseau de volontaires présent dans une vingtaine de villes en France, fait en sorte que cette expérience soit positive, pour la personne accueillie comme pour celle qui accueille.

Une durée limitée

Contrairement au projet CALM (Comme à la maison) récemment lancé par l'association Singa, qui se présente comme "l'Airbnb de réfugiés", le Service jésuite des réfugiés n'a pas pour premier objectif de loger les demandeurs d'asile. "On cherche d'abord à créer du lien social et amical entre les réfugiés et des familles françaises diverses, souligne Paul de Montgolfier. L'hébergement n'est qu'un moyen d'y parvenir". L'accueil des réfugiés, qui peut aussi ne se faire que le temps d'un repas ou d'un week-end (" Welcome Jeunes " propose également à des étudiants de participer à des moments de convivialité comme une partie de foot ou une soirée dansante) est donc toujours de courte durée : un mois maximum en moyenne, un même réfugié pouvant être reçu à tour de rôle par plusieurs familles. Les personnes accueillies, qui ont toutes déposées un dossier de demande d'asile et ont donc des papiers, restent ainsi plusieurs mois au sein du réseau JRS (cinq en moyenne en île-de-France), le temps qu'elles soient hébergées dans un centre d'accueil par l'Etat. Les familles restent ensuite souvent en contact avec le réfugié qu'elles ont reçu, et peuvent par exemple le réinviter pour un déjeuner ou un court séjour dans leur maison de vacances.

Un cadre bien défini

"Nous nous sommes aperçus qu'un cœur généreux l'est d'autant plus quand ce qu'on lui demande est raisonnable", note Paul de Montgolfier. Alors qu'au lancement de Welcome en 2009, l'association avait d'abord imaginé que la personne hébergée dînerait tous les soirs chez son hôte, elle est revenue sur cette idée. "C'est beaucoup trop lourd pour certaines familles, et ce n'est pas forcément un bon service que l'on rend au réfugié : ils sont souvent inscrits auprès d'associations qui distribuent des repas gratuits, et s'ils ne viennent pas parce qu'on les nourris, ils sont rayés des listes qu'il est ensuite difficile de réintégrer". JRS conseille donc que les repas au domicile ne se fassent qu'environ un soir par semaine. Et tout ceci est clairement défini dès le départ pour que l'accueil s'opère dans un cadre clair. De même, les hôtes fixent d'emblée les horaires auxquels le réfugié vient à la maison le soir et en repart le matin, si on lui laisse les clés ou s'il sonne lorsqu'il arrive...

Aucune rétribution

C'est l'un des points clés du système : il est complètement gratuit. Pas question de demander une rétribution financière à la personne hébergée, ni de lui demander d'effectuer un quelconque travail en échange de son hospitalité. "Ce qui n'empêche évidemment pas qu'elle participe aux taches ménagères comme n'importe quel membre de la famille", relève Paul de Montgolfier.

Pas de curiosité mal placée

"Attention : pas de questions sur ce qui peut être douloureux ou évoquer un interrogatoire policier", prévient JRS sur son site. Car certains accueillant pourraient vouloir d'emblée faire parler le réfugié de son parcours. "On leur explique que c'est très malsain pour lui. On connaît mieux l'autre quand on sympathise avec lui que quand on cherche à savoir des choses sur lui", poursuit le prêtre jésuite, qui préconise d'attendre que le réfugié, s'il le souhaite, parle de lui-même de son passé.

Des "tuteurs" qui veillent

Tout au long de l'expérience, des bénévoles de JRS veillent à ce que celle-ci se passe bien. Une famille qui manifeste le souhait de participer à "Welcome" va d'abord recevoir un "coordinateur" à son domicile. C'est lui qui décidera quel demandeur d'asile sera accueilli dans cette maison. "On ne va pas envoyer le même genre de personnes chez un général à la retraite qui vit avec sa femme dans un grand appartement du centre de Paris que chez un jeune couple avec trois enfants qui vit en proche banlieue, explique Paul de Montgolfier. Le général aura beaucoup de mal à accepter de parler avec de gestes, tandis qu'il sera beaucoup plus facile de placer quelqu'un qui parle très peu français dans une famille avec des enfants : ceux-ci vont très vite lui apprendre la langue".

Ensuite, durant l'accueil (il pourra s'être écoulé plusieurs mois depuis que la famille a joint l'association), un "tuteur" ou une "tutrice" vient chaque semaine rencontrer la personne hébergée pour voir si tout se passe bien. "Il peut parfois survenir des problèmes liés à des différences culturelles, raconte Paul de Montgolfier. Par exemple si la personne hébergée rote bruyamment à table, car c'est dans son pays une marque de satisfaction et de remerciement, les enfants peuvent être scandalisés et les parents désemparés. Il est bien plus facile que ce soit le tuteur qui vienne lui dire que dans notre culture, cela ne se fait pas".

Le nombre de migrants en forte baisse en 2016 : les Syriens représentent 26% des arrivéesSource : Sujet JT LCI
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Gilles DANIEL

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