Accusé de promouvoir l’infidélité, il est attaqué par les catholiques : ce qu'il faut savoir sur Gleeden, site de rencontres extra-conjugales

par Sibylle LAURENT
Publié le 24 novembre 2016 à 18h50
Accusé de promouvoir l’infidélité, il est attaqué par les catholiques : ce qu'il faut savoir sur Gleeden, site de rencontres extra-conjugales
Source : AFP

JUSTICE - Le tribunal de grande instance de Paris s'est penché ce jeudi sur une requête des Associations familiales catholiques contre Gleeden. Elles accusent le site de rencontres extra-conjugales de violer l'article 212 du code civil, qui prévoit la fidélité entre les époux. La décision sera connue d’ici quelques semaines.

 "Par principe, nous ne proposons pas de carte de fidélité" ; "Être fidèle à deux hommes, c’est être deux fois plus fidèle" ; "Tout le monde peut se tromper. Surtout maintenant". Des jeux de mots, un peu de provocation choquante. C’est, depuis ses débuts, la recette sur laquelle surfe le site de rencontres extra-conjugales Gleeden. 

Il est aujourd’hui attaqué en justice par les Associations familiales catholiques, qui l’accusent de promouvoir l’infidélité, en violation du code civil. Le tribunal de grande instance de Paris s'est penché ce jeudi sur la requête émise en 2015 (voir vidéo ci-dessous). Le jugement devrait être rendu d’ici quelques semaines. Petit retour sur l’affaire.

Quand les catholiques attaquent le site de rencontres extra-conjugales GleedenSource : Les vidéos infos
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Qui se cache derrière Gleeden ?

Gleeden, c’est une marque de Blackdivine, société lancée par deux frères parisiens, Teddy et Ravy Truchot, en 2009. La société possède une fournée de sites en tout genre, soit sur le même créneau de Gleeden, comme  Check me out, qualifié de "premier site de rencontres qui donne le pouvoir aux femmes", soit sur d'autres cibles comme Ugotawish, "site dédié au social shopping", ou encore Toyslegend, "achat-vente de jouets d’occasions pour les enfants". 

Les deux frères ont le sens du business. Teddy Truchot, installé depuis quelques années à Los Angeles, continue d’investir, à la fois dans des starts-ups, mais aussi dans la restauration. Son frère Ravy, qui sur le site à son nom se décrit comme un "entrepreneur, investisseur, visionnaire", suit la même carrière, et développe, à côté, des "projets passion", comme une académie de football à Miami.

Quel est le but de Gleeden ?

Gleeden nait en 2009 alors que les sites de rencontres traditionnels – Meetic, Easyflitrt, Parship, ou Attractive world – ont déjà quelques années de pratique à leur actif. Mais il mise sur un créneau bien spécifique : les personnes mariées, ou du moins en couple. Teddy Truchot a flairé la bonne aubaine : d’après lui, 30% des utilisateurs des sites de rencontres classiques sont en fait déjà "casés". Alors, autant assumer et leur réserver un espace dédié. Les deux frères ont en tout cas apparemment bien senti le marché : leur site revendique aujourd’hui 3 millions d’utilisateurs. 

La force de la com’ ?

Forcément, avec un positionnement surfant sur l’insolite et le sulfureux, Gleeden a bénéficié, dès sa sortie, d’une belle couverture médiatique. Le site a aussi savamment distillé ses campagnes de pub "pro-adultère" en juillet 2011, puis en 2012. Campagnes qui suscitent à chaque fois, des levées de boucliers, notamment chez les catholiques. En 2011, une opération de sponsoring de la météo  sur BFM TV est même censurée. Gleeden revendique aujourd'hui cette péripétie sur son site. Car en bien ou en mal, le site fait parler et assume. Et c’est bien l’essentiel pour lui car cela fait sa force. 

"Les femmes sont reines et choyées"

Gleeden aime les femmes. Le site insiste sur le fait qu’il est "pensé pour et par les femmes", que la majorité de ses membres sont des femmes. Un bel appât pour séduire une clientèle féminine, toujours la plus dure à capter sur ce genre de site… et attirer par-là bon nombre d’hommes mariés. D’autant que, serine Gleeden, l’infidélité, c’est léger, c’est cool, c’est tendance. 

Le site ne se prive pas de livrer très régulièrement des études, communiqués, ou articles, qui donnent le ton et envie : "Sommes-nous plus romantiques lorsque nous sommes infidèles ?", "Euro 2016 : le terrain de jeu de l’infidélité", "le sexe-est-il meilleur lorsqu’on est infidèles ?" Un Observatoire européen de l’infidélité et un Cercle d’expertes, sorte de cautions scientifiques, révèlent ainsi aux internautes quelles sont les "championnes de l’infidélité en Europe", "les lieux préférés des Européens pour voir leur(e) amant(e)", ou encore "les bienfaits associés à l’infidélité".  

Que reprochent les associations catholiques à Gleeden ?

En gros, de "faire du business avec l’infidélité".  Les Associations familiales catholiques accusent en effet le site de promouvoir l’infidélité, en violation de l’article 212 du code civil, selon lequel les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance.  "Nous ne jugeons pas les gens, qui font ce qu’ils veulent", explique une porte-parole des AFC à LCI. "La question posée n’est pas celle de l’infidélité. Mais celle du business de l’infidélité, de la promotion de la duplicité. On vend un produit qui repose sur du mensonge, les inscrits passant un contrat qui pousse à violer l’obligation de fidélité entre époux."

Quel était le but de l’audience de ce jeudi ?

L’action en justice de l’AFC a deux  buts. D’abord, "constater la nullité des contrats entre Gleeden et ses souscripteurs". Pour les AFC en effet, les contrats en en ligne que doivent signer les adhérents de Gleeden "visent à violer l’obligation de fidélité entre époux posée par l’article 212 du code civil". L’AFC veut aussi à interdire à Gleeden de "communiquer sur le caractère 'extra-conjugal' de la rencontre". 

"Plus largement, nous voulons aussi amener les gens à s’interroger sur ces sujets fondamentaux", précise la porte-parole des AFC. "Derrière les sourires ironiques ou convenus suscités par Gleeden, derrière la com’ disant que l’infidélité est en vogue, cela reste des drames personnels, et des familles déchirées". Une position d'ailleurs défendue dernièrement par la médiatique sexologue Thérèse Hargot, sur le plateau de Thierry Ardisson début novembre. L’audience de ce jeudi, consacré aux plaidoiries, ne devait pas donner de nouvelles informations ou nouveaux rebondissements. Le tribunal tranchera d'ici quelques semaines.

VIDÉO. Gleeden, défense d'afficher ? "Ces sites vantent la transgression de l'éthique"Source : Les vidéos infos
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Sibylle LAURENT

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