INDÉSIRABLES - A Bordeaux, les Parisiens sont perçus par certains habitants comme envahissants depuis que le TGV les y conduit en deux heures. Des autocollants les invitant à repartir d'où ils viennent sont placardés dans les rues. Ces attaques ont poussé Alain Juppé, le maire de la ville, a envisagé de porter plainte. Explication.
Le bonheur des uns fait le malheur des autres. Bordeaux n'est plus qu'à deux heures et quatre minutes de train de Paris depuis la mise en service de la ligne à grande vitesse en juillet 2017. Et les nouveaux venus ne sont pas forcément accueillis à bras ouverts.
Des autocollants sur lesquels est écrit "Parisien rentre chez toi" au dessus d'un dessin de TGV fleurissent ainsi dans la Cité girondine, rapporte Sud-Ouest, lundi 23 octobre 2017. L'hostilité est telle qu'Alain Juppé, le maire de la ville, a indiqué sur Twitter qu'il envisageait de porter plainte.
Il faut dire que l'heure gagnée, par rapport aux anciens trajets de trois heures quinze, agit comme un aimant non seulement pour les touristes mais aussi pour la clientèle d'affaire. Avant même la mise en service de la LGV le 2 juillet dernier, 56% des cadres parisiens (!) rêvaient de s'installer à Bordeaux (selon une étude CadreEmploi de 2016)
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Amis Parisiens, le vieux Bordeaux devient inabordable pour nous"
Front de libération bordeluche face au parisianisme
En juillet et août, soit dans les premiers jours de l'ouverture du Paris-Bordeaux en LGV, un million de voyageurs a été transporté de l’Ile-de-France à Bordeaux... soit une fréquentation en hausse de 75% par rapport à l’été précédent.
Le Front de libération bordeluche face au parisianisme (FLBP) s'est ainsi formé voilà quelques mois pour défendre avec humour son territoire contre la muséification. L'un de ses deux créateurs, joint par LCI, reproche surtout aux pouvoirs locaux de "tout faire pour attirer un maximum de visiteurs sans pour autant maîtriser la situation". Une "irresponsabilité" qui conduit à une envolée des prix de l'immobilier et qui pousse les habitants les moins aisés à s'installer à l'extérieur de la ville.
Sur sa page Facebook qui compte 5959 abonnés, il écrit ainsi : "[...] Amis Parisiens, merci de restaurer le vieux Bordeaux, mais du coup la ville se vide de ses habitants originels qui ne peuvent plus se l’offrir, et qui partent faire souche là où l’immobilier est resté abordable. Le constat est sans appel : c’est un carnage [...]"
Encore heureux, reprend la Résistance bordeluche, la mairie va encadrer les locations Airbnb en janvier. Les propriétaires vont devoir s'enregistrer et limiter le nombre de nuitées à 120 par an. Autre conséquence, un peu comme à Barcelone, "les bars à vins se sont multipliés à outrance, chassant les commerces dans certains quartiers tels que celui de Saint-Pierre", regrette-t-il.
Autre exemple, soulevé cette fois par Le Collectif Pavé brûlant, qui se donne pour objectif de lutter contre toutes les formes de domination : le prix des logements devient difficile à surmonter dans le quartier Saint-Michel, l'un des derniers bastions populaires du centre-ville, rapporte le quotidien régional. Ce qu'il ne manque pas de faire savoir en inscrivant des tags sur les murs :"St-Mich nique les riches" ou "Parlez pas de mixité quand vous gentrifiez".