En seulement 25 ans, la France est-elle passée de meilleur à pire pays de l'UE en maths ?

Publié le 16 décembre 2021 à 18h42, mis à jour le 17 décembre 2021 à 16h57
Si le niveau en maths baisse, il n'a jamais été en France le meilleur de l'UE.
Si le niveau en maths baisse, il n'a jamais été en France le meilleur de l'UE. - Source : Illustration Imgorthand via iStock

DÉCLIN - Un message largement relayé sur Internet indique qu'en 25 ans notre pays est passé de la première à la dernière place de l'Union européenne concernant les mathématiques. Une baisse exagérée malgré une tendance préoccupante.

Ces dernières années, il est fréquent d'entendre dire que le niveau des élèves français en mathématiques pose problème. Des résultats d'études internationales sont exhumés, montrant l'écart criant qui nous sépare des nations où la discipline est la mieux maîtrisée. 

Dans ce contexte, des discours déclinistes prospèrent, reprenant à l'envie le célèbre refrain "C'était mieux avant". Souvent subjectif, ce constat est-il pour autant valable en ce qui concerne les maths ? À en croire le message d'un internaute, largement relayé, "la France est passée de meilleure en maths à pire pays de l’UE en 25 ans". Un classement qui démontrerait "la nullité des élites politiques de notre pays". Lorsque l'on plonge dans les études, toutefois, il apparaît que si une baisse très nette s'observe, les jeunes français n'ont jamais été les plus doués dans cette matière à l'échelle du continent.

Une première évaluation datant de 1995

Bien que diverses études proposent de mesurer le niveau des élèves dans différentes matières, il en est une qui est quasi systématiquement prise en exemple dès lors que l'on s'intéresse aux mathématiques. Il s'agit de "TIMSS", dont le ministère de l'Éducation nationale explique qu'il s'agit d'une "étude comparative organisée par une organisation internationale, indépendante, à but non lucratif qui conduit des études pédagogiques dans le monde entier". Cette organisation, l’IEA, "s’appuie, pour évaluer les élèves de CM1 et de 4e, sur les programmes d’enseignement de mathématiques et de sciences communs aux pays participants". La France y a participé en 1995, puis à nouveau en 2015 et 2019. Les derniers résultats proposent donc d'observer une évolution sur une échelle de presque 25 ans.

Quand les derniers résultats ont étés dévoilés, le ministère a été contraint de reconnaître qu'avec "un score de 483 points, la France se situe sous la moyenne internationale des pays participants de l’UE et de l’OCDE (511)". Pire, "la France n’amène que 2 % de ses élèves au niveau avancé en mathématiques alors qu’ils sont en moyenne 11 % dans ces pays". Entre 1995 et 2019, force est de constater que "les résultats des élèves ont baissé de façon significative en France". Ce constat sévère omet de préciser que la France, si l'on se focalise sur les résultats des CM1, affiche les pires scores de l'UE. Et que seule la Roumanie, qui n'a pas fait passer les tests à ses élèves de CM1 fait pire en ce qui concerne les élèves de 4e. 

Quid de l'évolution dans le temps de ces résultats ? Se replonger en 1995 permet de visualiser que la baisse de niveau a été évidente, un décrochage très net dans les scores obtenus apparaissant dans les classements. 

Pour autant, assurer que la France affichait il y 25 ans les meilleurs résultats de toute l'UE se révèle trompeur. Pas moins de 7 pays faisaient mieux : la Belgique, la République tchèque, la Slovaquie, mais aussi les Pays-Bas, la Slovénie, la Bulgarie et l'Autriche. Cela n'empêchait pas la France de se trouver dans la moyenne haute à l'échelle continentale.

Un constat que déplore le corps enseignant

Il y a quelques mois, à l'occasion d'un précédent article, LCI avait tenté de comprendre la faiblesse des élèves actuels en maths. Et avait contacté le président de l'Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (APMEP), Sébastien Planchenault. Il mettait en avant des "problèmes de transmission de connaissances et de compétences en mathématiques" chez les élèves, qui s'expliquent entre autres par "une raison sociétale, avec notamment cette idée fausse que les mathématiques ne seraient pas faites pour tous". Une référence directe au "concept d'avoir ou non ce que certains appellent la bosse des maths." 

À ses yeux, la France affiche une "méconnaissance globale des maths", dont seule "la partie scolaire" serait mise en avant, sans s'intéresser au "sens premier, qui est de résoudre un problème". Même constat "pour la partie ludique de cette discipline", trop souvent occultée. Et de déplorer des réformes récentes comme celle du lycée, qui n'ont, à ses yeux, pas aidé à inverser la tendance, puisque les mathématiques ont été supprimées du tronc commun.

Sébastien Planchenault, cet été, mettait en avant un dernier point, relatif à la formation. "En 2010, quand on est passé à un concours en M2, le nombre de candidats a chuté", glissait l'enseignant. Tout en notant que "80% des enseignants du primaire n’ont pas suivi un cursus scientifique dans l’enseignement supérieur", un chiffre mis en avant il y a quelques années par le Centre national d’étude des systèmes scolaires (Cnesco).

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Thomas DESZPOT

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