Facebook, Instagram ou Snapchat ? Chez les ados américains, le choix du réseau social dépend des revenus des parents

Publié le 17 août 2018 à 21h06, mis à jour le 23 août 2018 à 11h51
Facebook, Instagram ou Snapchat ? Chez les ados américains, le choix du réseau social dépend des revenus des parents

RÉSEAUX SOCIAUX - Facebook n’est plus la plateforme en ligne la plus populaire chez les adolescents. Selon une étude américaine, les réseaux sociaux "d’images" comme Snapchat ou Instagram arrivent désormais en première place. Mais si on observe les résultats récoltés par le Pew Research Center, on comprend que le choix du réseau social dépend en fait surtout de la classe sociale.

Réseau social rimerait avec classe sociale. Selon le Pew Research Center (PRC), la part des adolescents utilisant Facebook a diminué de 20 points de pourcentage en trois ans. Seule la moitié des jeunes Américains de 13 à 17 ans utilise désormais ce réseau. C’est beaucoup moins que Snapchat et Instagram, qui atteignent près de 70%. Mais si on examine les données démographiques de ces utilisateurs, on observe une division claire. Les classes les plus aisées sont sur les applications de partage d’images, quand les autres utilisent toujours Facebook. 

Les adolescents dont les parents ont des revenus plus bas utilisent plus Facebook
Les adolescents dont les parents ont des revenus plus bas utilisent plus Facebook - Pew Research Center

Dans cette étude, la part d'ados utilisant Facebook augmente considérablement chez les jeunes issus de familles aux revenus plus bas. Ainsi, sept adolescents sur dix dont les parents gagnent moins de 30 000 dollars par an (26 000 euros) déclarent utiliser Facebook. Ce chiffre dégringole considérablement, tombant à 36% des jeunes, chez ceux dont le revenu familial annuel est de 75 000 dollars ou plus.  

Des applications de l’image

Déjà en 2015, le PRC, un think tank américain qui fournit des statistiques et des informations sociales notamment sous forme de sondage d'opinion, montrait cette tendance. Mais il y a trois ans, les raisons étaient beaucoup plus naturelles. Que ce soit l’application à la caméra rétro ou celle au petit fantôme jaune, toutes les deux font la part belle à l’image. Le texte étant clairement mis au second plan. Y prévalaient donc alors des images de vacances dans des lieux exotiques et paradisiaques, des photos d’assiettes somptueuses dans des grands restaurants, ou les nouvelles tendances mode. Concernant Snapchat, où les images sont bien plus ordinaires, souvent des vidéos de la vie quotidienne, l’application utilise beaucoup de données de 3G. Deux critères qui expliquent pourquoi elles étaient alors prisées des classes aisées : il fallait un bon abonnement téléphonique, une vie prospère et surtout un smartphone.

Mais aujourd’hui, Instagram a gagné en popularité.  Et a mis tout le monde d’accord. Notamment parce que la publication de photos du quotidien, de sa famille et des amis, est beaucoup plus fréquente. Ainsi, 71% des jeunes de 18 à 24 ans l'utilisent désormais. Alors en 2018, pourquoi les jeunes des classes les moins aisées continuent-ils de plébisciter Facebook ?

Facebook, le réseau des opportunités

Tout d’abord, l’usage du smartphone dépend bien du niveau de vie. Selon l’étude, il semblerait que presque tous les ados américains aient accès à des smartphones (85%), et ce chiffre ne varie que de  4 points entre les différentes classes sociales. Sauf que les usages diffèrent. Ainsi, dans les milieux sociaux plus défavorisés, il est fréquent que les frères et sœurs se partagent un même smartphone. Ce qui les empêche de prendre leur quotidien en photo afin de le publier sur ces réseaux. De plus, ces applications demandent d’avoir un téléphone récent. Les mises à jour étant fréquentes, si le système d’exploitation du mobile est trop ancien, il ne pourra pas les supporter. Pour couronner le tout, il est nécessaire d’avoir une connexion au réseau internet mobile permanent. Ce qui n’est pas le cas dans les classes les plus pauvres où les enfants dépendent surtout du Wi-Fi.

Ce qui est réellement au cœur des différences est l’utilité que chacun trouve dans les réseaux sociaux. Instagram et Snapchat sont souvent vus comme des applications pour faire passer le temps. Ce qui est moins le cas de Facebook, et notamment pour les adolescents les plus pauvres. Ce réseau social aux 2,2 milliards d'utilisateurs actifs par mois est davantage un puits d’opportunités. En premier lieu, il permet de trouver un lieu d’entraide et d’écoute. Entre pages ouvertes ou groupes fermés, il est l'occasion pour un adolescent de partager avec des membres qui lui ressemblent. Alors si un ado est victime de racisme, par exemple, ou s'il subit une quelconque forme de discrimination, il va pouvoir partager son expérience avec des membres de sa communauté. Car si la photo aide souvent à faire passer un message fort, Facebook continue de faire la part belle au texte.  

Ensuite, la société de Mark Zuckerberg permet de rester en contact. Les voyages pour visiter un cousin éloigné ou un ami d’enfance sont forcément plus rares chez ceux dont les parents n’ont pas les moyens. Une donnée que relèvait le rapport de 2015 du PRC. Il montrait que les adolescents à revenu élevé se retrouvent plus souvent avec leurs amis proches que les enfants des ménages à faible revenu, qui communiquent via les messageries en ligne. Enfin, la fonction "événements" du réseau social est son principal atout. Il est l’un des outils les plus puissants pour s’organiser autour d’une cause commune, d’un combat social. Et en cas de volonté de créer une mobilisation ou un appel à manifester, c’est toujours sur Facebook qu’il sera fait. Rien à voir avec Snapchat ou Instagram, donc. Qui, dans leurs pages où l'on affiche sa belle vie, ne donnent aucun moyen pour faciliter l'activisme. 


Felicia SIDERIS

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