Fin du conflit des routiers : y a-t-il une brèche dans les ordonnances réformant le travail ?

DÉROGATION - La mobilisation des chauffeurs routiers s'est terminée mercredi avec un accord entre les syndicats, le patronat et le gouvernement préservant le mode de rémunération actuel de la profession. L'accord est-il vraiment fidèle à "l'esprit des ordonnances", comme l'affirme le gouvernement, qui redoute d'autres mouvements sociaux ?
Un accord qui satisfait toutes les parties. Le consensus trouvé mercredi soir entre les syndicats de transport routier, le patronat et le gouvernement n'a officiellement fait que des heureux. Le ministère du Travail a pourtant freiné des quatre fers, dans les heures qui ont précédé l'issue positive, avant de donner son consentement. En cause : des garanties sur les rémunérations des routiers qui risquaient de contredire les toutes nouvelles ordonnances réformant le Code du travail.
A l'arrivée, la profession a obtenu, d'après les syndicats, les garanties qu'elle souhaitait. Les diverses primes (13e mois, rémunération des jours fériés ou encore du travail de nuit) ainsi que les "frais de route" spécifiques à leur métier ont été pérennisés malgré l'entrée en vigueur des ordonnances. Le gouvernement, quant à lui, a fait mine de se réjouir d'un accord signé "dans le respect de l'esprit des ordonnances". Vrai ? Pas tout à fait.
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Si l'accord est fidèle à "l'esprit" de la loi, c'est avant tout parce qu'il témoigne d'un dialogue social réussi entre les syndicats et le patronat, ce qui était précisément l'objectif affiché des ordonnances. Mais en réalité, cet accord, trouvé après des mouvements de blocages organisés par la profession, a plutôt été conclu "malgré" les ordonnances. En effet, celles-ci ont donné la primauté à l'accord d'entreprise sur l'accord de branche dans de nombreux domaines. Parmi ceux-ci : la négociation des primes, comme la prime d'ancienneté, le 13e mois, la rémunération des jours fériés ou encore les fameux "frais de route" qui peuvent représenter jusqu'à 1.000 euros dans la rémunération des routiers. Pour les syndicats, un accord d'entreprise moins-disant sur ces questions aurait pu entraîner de fortes baisses de rémunération.
Le projet d'accord stipule donc que "les éléments de rémunération compensant le travail de nuit, les jours fériés et les dimanches" deviennent "partie intégrante" des salaires minimaux hiérarchiques, et relèvent donc d'une convention collective et non d'un accord d'entreprise. Ce qui constitue bien une dérogation à la nouvelle législation.
Eviter la contagion
L'enjeu, pour l'exécutif, est bien entendu d'éviter que la négociation spécifique aux routiers ne serve d'exemple à d'autres catégories socio-professionnelles qui souhaiteraient bénéficier de dérogations similaires. Un risque qui évidemment n'a pas échappé aux syndicats. Dès mercredi soir, la CGT-Transports a prévenu que "le combat continue contre les ordonnances", estimant que l'accord constitue "une première entorse aux ordonnances et favorise la négociation collective de la branche".
Une journée de mobilisation est déjà prévue, le 13 octobre, dans le secteur de la métallurgie, qui veut "défendre", elle aussi, "sa convention collective" trois jours après la journée d'action dans la fonction publique. Bref, la rentrée sociale du gouvernement n'est pas terminée.
Reste à savoir comment l'exécutif intégrera l'exception des routiers dans le corpus de ses ordonnances, de façon à éviter que l'expérience ne se renouvelle à l'avenir.
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