Francis Heaulme devant la justice : Montigny-lès-Metz, la longue route vers la vérité

par Maud VALLEREAU
Publié le 30 mars 2014 à 11h29
Francis Heaulme devant la justice : Montigny-lès-Metz, la longue route vers la vérité

PROCÈS - Le 28 septembre 1986, deux enfants de Montigny-les-Metz étaient massacrés à coups de pierres près d'une voie ferrée. Après 15 années passées derrière les barreaux, Patrick Dils finissait par être innocenté. Ce lundi, c'est le tueur en série Francis Heaulme qui prend place dans le box des accusés.

Le "routard du crime" reprend le chemin des tribunaux. A partir de lundi, Francis Heaulme est jugé devant la cour d'assises de Moselle pour le double meurtre de Montigny-lès-Metz. Pour Gabrielle Beining, ce quatrième procès, dans cette affaire émaillée de loupés judiciaires et de rebondissements, est "celui de la dernière chance". Le 28 septembre 1986, son fils Cyril, 8 ans et un de ses copains, Alexandre Beckrich, sont retrouvés les crânes fracassés près d'une voie de chemin de fer. Les enquêteurs croient tenir le coupable lorsqu'ils arrachent des aveux à Patrick Dils, un adolescent introverti et fragile. Condamné à la perpétuité puis à 25 ans de prison, il est finalement acquitté en 2002 après 15 années pour rien derrière les barreaux.

Dès lors, les regards se tournent vers Francis Heaulme, qui hante le dossier depuis les années 1990. A l'époque, le gendarme Jean-francois Abgrall enquête sur son parcours. Obtenir du tueur en série des aveux se révèle complexe. L'homme n'éprouve aucun remord et il a pris l'habitude de relater ses souvenirs de crime sous la forme d'un puzzle éparpillé. Mais "il ne sait pas élaborer un mensonge. Pour lui, mentir c'est mélanger des informations. Les explications qui ne collent pas à un meurtre correspondent toujours à un autre commis là où il est passé également", explique le gendarme qui finira par faire le rapprochement avec Montigny-lès-Metz.

"Mon style, c'est l'Opinel !"

Une nouvelle instruction a depuis retenu des éléments à charge contre lui : les enquêteurs ont conclu à sa "quasi-signature criminelle", des témoins l'ont vu près des lieux des crimes, deux pêcheurs l'ont raccompagné dans leur voiture le visage ensanglanté et deux de ses compagnons de cellule affirment avoir recueilli les confessions du tueur. L'accusé lui-même raconte que ce dimanche de 1986, il roulait à vélo près de la voie ferrée lorsque "des enfants" lui ont jeté des cailloux. Il dit avoir aperçu les deux victimes vivantes, puis mortes, mais il nie farouchement les avoir tuées : "Mon style, c'est l'Opinel ! Et j'étrangle les mains nues". Un argument un peu léger pour un homme qui, entre 1984 et 1992, sillonna la France, tuant ça et là, neuf personnes à l'aide d'armes diverses. "J'ai vu rouge", avancera-t-il en guise d'explications.

Si un faisceau d'éléments semble aujourd'hui l'accabler, le manque de preuves matérielles est sans conteste : de nombreuses pièces à conviction ont disparu, les scellés ont été détruits légalement quelques années après la condamnation de Dils, l'ADN ne parlera plus. La défense ne manquera pas de le rappeler, tout comme ce témoin surprise, ajouté in extremis à la liste des 80 personnes qui seront appelées à la barre durant les trois prochaines semaines. Plus de 28 ans après, un retraité de la SNCF s'est en effet manifesté en assurant avoir vu, depuis sa locomotive, un homme en sang à l'heure et à proximité des lieux où ont été retrouvés les corps de Cyril et Alexandre. Et il désigne Henri Leclaire. Celui-ci avait un temps fait figure de troisième homme dans cette affaire, après avoir avoué le double meurtre avant de se rétracter. Comme Heaulme en 2006, Leclaire a obtenu un non-lieu en 2013. Mais le premier est aujourd'hui accusé, l'autre, témoin assisté. Le chemin de la vérité s'annonce encore long et jonché d'embûches.


Maud VALLEREAU

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