Ce que contient le rapport sur l'outrage sexiste remis mercredi

Anaïs Condomines avec Amélie Carrouer
Publié le 24 février 2018 à 11h31
Ce que contient le rapport sur l'outrage sexiste remis mercredi
Source : AFP / illustration

RECOMMANDATIONS - Cinq députés rendent leur rapport sur la nouvelle infraction de "l'outrage sexiste" - punie à hauteur de 90 euros d'amende - mercredi 28 février aux ministres de l'Intérieur, de la Justice et à la secrétaire d'Etat à l'égalité entre femmes et hommes. Le document, que LCI a pu consulter en intégralité, fait état d'autres recommandations.

Il sera officiellement remis mercredi 28 février aux ministres de l'Intérieur, de la Justice et à la secrétaire d'Etat à l'égalité entre les femmes et les hommes, mais le contenu du rapport parlementaire sur le harcèlement de rue est d'ores et déjà connu. Dans le document que s'est procuré LCI en intégralité, cinq députés se positionnent en faveur de la création d'une nouvelle infraction, celle de "l'outrage sexiste".

Qui dit infraction, dit sanction : sans surprise - et comme cela avait déjà fuité dans la presse, les parlementaires proposent donc de punir d'une amende immédiate de 90 euros "tout propos, comportement ou pression à caractère sexiste ou sexuel" dans l'espace public. Une contravention de 4e classe qui pourrait s'élever à 200 euros si elle était payée dans les 15 jours et à 350 euros dans le cadre d'une amende majorée. Dans le cas où des circonstances aggravantes seraient retenues, la contravention passerait alors en 5e classe. Très concrètement, ce sont les agents de la police de sécurité du quotidien qui géreront cet outrage "en flagrance", ce qui n'exclut pas pour la victime la possibilité de porter plainte plus tard, de manière classique. 

D'autres recommandations

Voilà pour l'aspect pratique de ces préconisations, destinées à "poser un interdit social" sur ces faits et à "limiter le passage à l'acte sur des faits plus graves". Mais au-delà de la mise en oeuvre de la contravention, l'équipe de parlementaires formule d'autres recommandations, qui pourraient être retenues dans le projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles, présenté dans les prochaines semaines en conseil des ministres. En voici quelqu'unes :  

Nouveaux stages, nouveaux budgets

C'est une recommandation placée tout en haut de la liste par les députés : la création d'un "nouveau stage dédié à la lutte contre le sexisme et à la sensibilisation à l'égalité entre les femmes et les hommes". Une préconisation qui suppose de faire appel aux associations compétentes, et donc de "prévoir des moyens supplémentaires dès le budget 2019" afin de permettre une action homogène sur l'ensemble du territoire. 

Avec une enveloppe de près de 30 millions d'euros, le secrétariat d'Etat à l'égalité entre les femmes et les hommes représente l'un des plus petits budgets de l'Etat. 

Une verbalisation dans les transports

L'idée ne sera pas de permettre aux conducteurs de bus, par exemple, de verbaliser qui que ce soit. En revanche, les parlementaires souhaitent permettre aux agents assermentés de pouvoir verbaliser dans les transports ferroviaires ou guidés. Sont ainsi concernés, entre autres, les agents missionnés des services internes de sécurité de la SNCF, les agents de police municipale ou encore les agents chargés de la surveillance de la voie publique. 

En outre, les auteurs du rapports voudraient voir se développer "une application permettant aux victimes de déclencher l'enregistrement de l'infraction et signaler par géolocalisation les faits en temps réel", ainsi qu'une campagne d'affichage public pour rappeler cette nouvelle infraction. 

Une attestation scolaire de prévention

Les parlementaires font le constat que "le sexisme et les comportements qui en résultent reposent sur des traditions culturelles et des représentations stéréotypées qui instituent une différence de valeur, de statut et de dignité entre femmes et hommes". Qu'à leur avis, "l'éducation reste la meilleure solution pour endiguer les discriminations et toutes formes de harcèlement". Mais s'il existe déjà un parcours citoyen et un parcours éducatif de santé qui permettent de "donner corps à ces actions", sa mise en place se révèle, selon les députés, "hétérogène d'un établissement scolaire à un autre". Leur recommandation consiste donc à "créer une attestation scolaire de prévention des violences et de l'égalité filles-garçons sur le modèle de l'actuelle attestation de sensibilisation à la sécurité routière". Une attestation qui serait ainsi délivrée en classe de 5e puis de 3e. 

De la même manière, le rapport préconise de créer un observatoire de l'égalité au sein de chaque établissement d'enseignement secondaire et de proposer une formation à la lutte contre les préjugés sexistes et à la sensibilisation à l'égalité entre les filles et les garçons aux professionnels de la petite enfance et de l'éducation nationale. 

Une réflexion sur l'aménagement urbain

Qui dit "outrage sexiste" dans l'espace public, dit aménagement urbain. C'est en tout cas la conviction des auteurs du rapport, qui souhaitent "intégrer dans les programmes d'aménagement urbain et du territoire le filtre de l'égalité entre les femmes et les hommes pour une meilleure prise en compte des inégalités". Il s'agirait, entre autres, de "sensibiliser les maires à la question de la féminisation des noms de rues et de bâtiments publics", étant donné qu'en 2016, à Paris, 4% seulement des rues portaient le nom d'une femme.

Formation des professionnels

Les gendarmes et policiers dans le viseur des parlementaires. Ces derniers estiment en effet qu'il faut "poursuivre la dynamique de formation initiale et continue des professionnels en matière de repérage et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles et intégrer dans les outils de formation, particulièrement des policiers, des gendarmes, des agents assermentés des transports, la nouvelle infraction d'outrage sexiste et sexuel." 

En outre, il s'agira également de "rendre effectif les protocoles de traitement des mains courantes et des dépôts de plainte pour que les femmes ne soient plus confrontées à des refus ou des résistances".

Focus sur le cyber outrage

Enfin, le rapport considère qu'Internet relève aussi de l'espace public. Et envisage la question du cyber-outrage : "Pour mieux prévenir le cyberharcèlement et mieux poursuivre les auteurs (...) le cyber-outrage est une question qui doit faire l'objet davantage de réflexion" peut-on ainsi lire. Dans leurs préconisations, les députés proposent donc que ce phénomène soit défini dans la loi à venir, "soit uniquement dans sa dimension sexiste, soit plus largement, sous toutes ses formes (racisme, harcèlement scolaire, en raison de la religion de la personne, etc...) dans une loi séparée". À noter que le cyberharcèlement figure d'ores et déjà dans la loi et est puni de deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende. 


Anaïs Condomines avec Amélie Carrouer

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