La campagne "d'information" du lobby du vin fait enrager les autorités sanitaires

par Sibylle LAURENT
Publié le 9 décembre 2015 à 14h00
La campagne "d'information" du lobby du vin fait enrager les autorités sanitaires

EPINGLEE - L’association Vin & Société, qui représente la filière viticole en France, lance une grande campagne d’information sur le vin, notamment autour des repères de consommation. Mais la Haute autorité de santé fustige cette "campagne publicitaire (qui) détourne un outil médical de lutte contre les dangers de l'alcool".

C’est sûr, leur campagne est remarquée. Mais peut être pas dans le sens escompté. Dimanche, l’association Vin et Société, qui représente la filière viticole en France, a lancé la "première campagne d’information nationale grand public" visant à communiquer sur les repères de consommation d'alcool. Mais ça n'a pas du tout, du tout plu à la Haute autorité de Santé.

La campagne de Vin et Société se décline en quatre affiches ludiques, autour des vins rouge, rosé, blanc et pétillant, et sera visible jusqu’au 21 décembre dans les médias papier et web, sur les réseaux sociaux, via des vidéos web et visuels rigolo. Le slogan "Aimer le vin, c’est aussi avoir un grain de raison" est illustré par des petits grains de raisins dotés de jambes et de bras, qui incarnent "le savoir vivre dans le respect de soir, des autres et du produit", indique le communiqué de presse de Vin et Société. 


Les visuels de la campagne.
Les visuels de la campagne. - Vin et Société


En bas des visuels, apparaissent les fameux repères pédagogiques "2.3.4.0", mentionnant le nombre de verres que, suivant sa situation, chacun peut boire. Bref, une campagne qui se veut "pédagogique" et "préventive".


Les chiffres mis en avant par Vin et Société.
Les chiffres mis en avant par Vin et Société. - Vin et Société


Le hic, est que les chiffres sont loin de plaire à la Haute autorité de santé. Pour elle, les repères donnés par Vin et Société sont en fait des "seuils d’alerte, au dessus desquels les risques sont avérés : dommages physiques, psychiques ou sociaux", explique-t-elle dans un communiqué publié mardi .  "Ces seuils de consommation à risque nécessitant une prise en charge médicale. La HAS met donc clairement en garde contre "une campagne publicitaire qui instrumentalise des messages professionnels".

Sur les réseaux sociaux aussi, des professionnels de la santé s’offusquent de ces recommandations.

Mais chez Vin et Société, on se dit “perplexe” face à cette déclaration de guerre chiffrée. D’abord, parce que l’association assure s’appuyer sur les données officielles, mises en avant sur divers sites étatiques. "Ces repères de consommation sont présents dans le Programme national nutrition santé depuis 2011 ", insiste auprès de metronews Audrey Bourolleau, déléguée générale de Vins et Société. "On les trouve aussi ces seuils sur le site du ministère de la Santé, d’ Alcool Info service , ou encore sur le site de l’ Assurance maladie et de l’INPS." Sur les seuils maximums épinglés par l’HAS, la déléguée agite la comparaison autoroutière : "C’est le même principe que l’autoroute : elle est limitée à 130 km/h. On sait qu’en allant au-delà, on se met en danger. Mais on fait confiance à l’intelligence des Français pour être responsables."

Vin et Société affirme jouer un rôle de prévention. "Nos sondages montrent que 9 Français sur 10 ne connaissent pas ces seuils de prévention", insiste Audrey Bourolleau. "On veut diffuser ces repères de consommation pour donner un cadre à une consommation responsable et raisonnable. Mais on a l’impression qu’une filière est discréditée dès qu’elle tente de faire de l’information..." Une semaine après l'assouplissement de la loi Evin , qui encadre la publicité pour l'alcool en France, la communication du lobby du vin est plus que jamais sous haute surveillance.

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Sibylle LAURENT

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