Le stealthing, un abus sexuel dont on parle peu mais qui inquiète

par Charlotte ANGLADE
Publié le 27 avril 2017 à 13h25, mis à jour le 27 avril 2017 à 13h39
Cette vidéo n'est plus disponible

Source : Sujet JT LCI

ABUS - Enlever son préservatif sans le consentement de son ou sa partenaire au milieu de l'acte sexuel... Voilà un abus qui a de quoi effrayer. Appelée stealthing ("furtivité" en français...), il semble pourtant avoir de plus en plus d'adeptes. Une juriste, qui vient de publier une étude sur le sujet, a pu recueillir les témoignages de quelques victimes.

À chaque fois, les témoignages débutent de la même façon : "Je ne suis pas sûre que c’est un viol, mais…". Alexandra Brodsky, juriste au National Women’s Law Center, a publié il y a quelques jours une étude dans le Columbia Journal of Gender and Law qui fait froid dans le dos. 

Elle porte sur le stealthing, un abus qui consiste à ôter son préservatif à l'insu de son partenaire en plein acte sexuel. L’auteure raconte avoir débuté ses recherches en 2013, après que plusieurs de ses amies ont été abusées de cette façon. Les victimes, majoritairement des femmes, ont pour certaines été interviewées par la juriste.

La peur des grossesses et des IST

Sida, les fausses idées des jeunesSource : JT 20h Semaine
Cette vidéo n'est plus disponible

Parmi tous les témoignages recueillis, la peur d’une grossesse non désirée ou des infections sexuellement transmissibles (IST) est prédominante. L’une des victimes, sous le choc, raconte à propos de son partenaire sexuel : "Aucun de ces risques ne l’inquiétaient. Ça ne le perturbait pas. Ni ma potentielle grossesse, ni ma potentielle IST".  Et une autre femme de raconter elle aussi : "Il a considéré qu'il n'y avait aucun risque pour lui et n'a pas daigné s'intéresser à ce que je risquais de mon côté". Au-delà de ces craintes et de ce sentiment de trahison, les victimes expriment un sentiment de "violation claire de leur autonomie corporelle et de la confiance placée, à tort, dans leur partenaire". Beaucoup d’entre elles n’osent cependant pas qualifier cette mauvaise expérience de viol.

L'instinct masculin comme couverture

Pour répondre à leurs questions, à leurs craintes, beaucoup se tournent vers internet et ses forums. Mais ceux-ci sont aussi le lieu d’encouragements vis-à-vis des pratiquants du stealthing. Les partisans de cet abus y procurent des conseils fournis de modes d’emploi explicites visant à rouler dans la farine avec succès son ou sa partenaire en enlevant discrètement son préservatif pendant l’acte sexuel. Certains "stealther" défendent leurs actes par "l’instinct naturel masculin". Les propos de l’un d’entre eux sont ainsi rapportés par Alexandra Brodsky : "Éjaculer dans le ***** d'une femme fait partie de l’instinct masculin. Il ne devrait jamais faire une croix sur ce droit. En tant que femme, il est de mon devoir d’écarter mes jambes et de laisser un homme éjaculer dans mon ***** mouillé". "Pour moi, vous ne pouvez pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Si elle veut le sexe du gars, alors elle doit aussi prendre sa semence !!!", renchérit un autre internaute.

Selon l’experte en Sexe et relation chez Durex, Alix Fox, interviewée par le Huffpost UK, certaines femmes pratiqueraient aussi le stealthing "en compromettant l’efficacité des préservatifs, en les perçant avec des trous presque invisibles avec des aiguilles ou en les malmenant secrètement, afin de tomber enceintes".

Un Français déjà condamné en Suisse pour stealthing

Publiée aux États-Unis, l’étude propose une nouvelle régulation afin de considérer cette pratique en tant que violence sexuelle. "Une victime de retrait de préservatif devrait pouvoir porter plainte, mais devrait sûrement se battre pour prouver des blessures corporelles suffisantes", explique la juriste. À moins d'avoir attrapé une MST....

En France, la législation est telle qu’un agresseur pourrait se faire condamner pour viol. L’article 222-23 du Code pénal français définit comme un viol "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui, par violence, contrainte, menace ou surprise". Aucun cas n'a cependant été déclaré. En Suisse, un Français de 47 ans a en revanche été condamné en janvier dernier par le tribunal correctionnel de Lausanne à douze mois de prison avec sursis pour avoir expérimenté le stealthing. La victime avait dû subir quatre mois de traitement préventif contre le VIH.


Charlotte ANGLADE

Tout
TF1 Info