Six mois après, que devient la première Boutique sans argent de Paris ?

par Sibylle LAURENT
Publié le 15 avril 2016 à 13h19
Six mois après, que devient la première Boutique sans argent de Paris ?

L'HEURE DU PREMIER BILAN - La Boutique sans argent organise une kermesse, samedi prochain, dans le 12e arrondissement de Paris. L'occasion de dresser un premier bilan, six mois après le lancement de ce magasin où tout est gratuit. Et devinez quoi, ça cartonne. Metronews fait le point avec son heureuse gérante, Debora.

Vous en souvenez-vous ? En septembre dernier, metronews était allé tester la première Boutique sans argent de Paris. Et avait découvert, un brin émerveillé, ce système d'échange basé sur le don : chacun peut venir prendre ce qui lui plaît. Mais également (s'il le veut) déposer des vêtements ou objets dont il n’a plus l’utilité. Forcément, c'était en rodage. Mais quand même, ça sentait à plein nez la riche idée. Les visiteurs se pressaient, furetaient, discutaient. Les médias arrivaient, relayaient, enchantés par cette boutique révolutionnaire. Bref, Siga-Siga, la boutique sans argent, emmenée par sa très souriante directrice Debora Fischkandl,  carburait. Bon, ok. Mais l'engouement allait-il durer, l'effet de nouveauté passé ? 

Et bien, rassurez-vous, les affaires tournent aussi vite qu'avant. Peut-être même plus. "Ça continue ! C'est toujours assez intense", sourit, au téléphone, Debora. Ravie. "C'est fou, c'est trop bien !", s'enthousiasme-t-elle. Car oui, ça marche, ça roule, au point même qu'aujourd'hui, la Boutique sans argent a une activité "cinq fois plus importante que ce à quoi on s'attendait". Avec des courbes de croissance à faire pâlir d'envie les meilleurs commerciaux de France. "Sur les six premiers mois d'activité, on a eu 21.000 visites, et 86.000 objets déposés", détaille la gérante. Selon elle, l'engouement médiatique - et donc la communication - ont nettement joué. "Mais des personnes viennent aussi par les réseaux sociaux, le bouche-à-oreille." Ce qui assure à la Boutique sans argent environ 800 à 1000 visiteurs chaque semaine, avec un beau pic d'affluence le samedi. "On est hyper satisfaites. C'était un coup d'essai, une sorte de test, et ça fonctionne."

'Une pote d'entrée vers l'économie circulaire"

Et si ça marche si bien, c'est que le public a bien adopté ce principe de don gratuit. "Les affaires arrivent, tournent très, très bien", note Debora. "On a environ 30% de vêtements, 20% d'objets pour enfants, 20% de biens culturels, mais aussi de la décoration, de la vaisselle, des petits accessoires de maison. Et ce public habitué est, lui aussi, très diversifié. "Des gens du quartier viennent un peu plus régulièrement, mais ce n'est pas la majorité de la clientèle", rapporte Debora. Les habitants du 12e représentent d'après elle 20% des visiteurs. Mais un tiers viennent de tout Paris, un autre tiers d'Ile-de-France, et 8% sont extérieurs à la région. "Le public est très diversifié, et une partie n'était pas forcément portée sur la récup'. Ça fait une véritable porte d'entrée vers l'économie circulaire, l'univers du ré-emploi, ou des ressourceries."

Les statistiques de fréquentation montrent même, surprise, 1% d'étrangers ! "On a été très relayé par les médias étrangers, comme la Res Publica ou El Païs", se réjouit Debora. Des curieux arrivent donc d'Italie, d'Espagne, ou encore de Suisse. Séduits par ce nouveau mode de consommation, basé sur la solidarité. "En fait, ce système n'existe pas partout", explique Debora. "Et dans les pays où c'est développé, comme en Suisse, les magasins gratuits ressemblent davantage à des squats, fonctionnant en auto-gestion… Là, on est complètement en partenariat avec les acteurs publics, la Région, c'est complètement ouvert."

Forcément, avec autant de succès, il fallait bien qu'il y ait un revers. Et il en est la conséquence directe : l'espace devient limité, il faudrait pousser les murs. C'est d'ailleurs le principal objectif de la gérante, aujourd'hui : "On monte en puissance, on est dans la logique d'avoir un local plus grand, plus adapté, facilitant mieux la circulation." Un endroit qui permettrait, aussi, de mieux développer "l'espace convivialité", où sont proposés thés ou cafés à prix libres. "Ici, les visiteurs se parlent, trouvent déjà que c'est un espace de sociabilité. Mais on veut améliorer encore plus cet aspect-là." Dans cette veine, les "ateliers de dons de compétence et de savoir-faire", lancés dernièrement, sont déjà un vrai succès. "On a déjà eu des initiations au tricot, des ateliers d'origami, ou sur la détente corporelle. Et ça fonctionne super bien. La vie est belle !", se réjouit Debora. Toujours souriante, même après six mois de sprint et de journées chargées. On dirait bien que le don gratuit, ça rend la vie plus sympa...

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Sibylle LAURENT

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