"Une question d'honneur" : Louis de Causans, le comte "spolié" de Monaco, réclame 351 millions d'euros à la France

Mathilde GUÉNÉGUAN et Hélène BONNET
Publié le 17 août 2018 à 7h41
"Une question d'honneur" : Louis de Causans, le comte "spolié" de Monaco, réclame 351 millions d'euros à la France

JUSTICE - Le comte Louis de Causans accuse l’Etat français d’avoir falsifié les règles de succession de la Principauté de Monaco au début du XXe, spoliant ainsi sa famille du trône qui aurait dû lui revenir. LCI l'a rencontré.

De l’aveu de son avocat, Maître Jean-Marc Descoubes, il s’agit d’un "dossier hors-norme". Le comte Louis de Causans a engagé une demande de dédommagement de 351 millions d’euros auprès de l’Etat français. "Une somme à la hauteur du préjudice" subi par sa famille. Selon lui, elle aurait injustement été écartée du pouvoir en 1922, au profit des ancêtres du prince Albert II de Monaco.

Il s’agit d’une procédure administrative classique de "responsabilité sans faute" contre l’Etat, explique Maître Descoubes. "En France, une décision de l’exécutif n’est pas attaquable. Mais on peut demander à l’Etat de réparer les dommages liés à une décision politique." La demande a été reçue le 2 juillet dernier par le cabinet de Jean-Yves Le Drian. En l’absence de réponse du Ministère des affaires étrangères au bout de deux mois, Louis de Causans sera en droit de saisir le tribunal administratif. "Nous ne sommes pas fermés à une négociation", précise l’avocat. Il semble pourtant peu probable que l’Etat réponde favorablement. Une fois au tribunal et en cas de recours successifs, l’affaire pourrait durer une dizaine d’années.

Les raisons d'une "escroquerie"

Pour mieux comprendre d’où vient "l’escroquerie" dénoncée par Louis de Causans, il faut remonter l’arbre généalogique des Grimaldi. Le comte et Albert de Monaco ont un ancêtre en commun : Honoré III, un prince qui a régné sur le Rocher au XVIIIe siècle. L’homme a engendré trois lignées : celle de l’actuelle famille régnante, une branche allemande issue d’un mariage (les Wurtemberg-Urach) et celle de la famille de Chabrillan, les ancêtres de Louis de Causans.

Au début du XXème siècle, Louis II règne sur la Principauté. Il s’agit d’"un vieux garçon" sans descendance qui refuse le mariage. Dans ce cas, les règles successorales en vigueur à l’époque sont claires : le pouvoir doit revenir à son cousin Guillaume II de Wurtemberg-Urach. "Nous sommes à l’aube de la Première Guerre mondiale. Pour la France il est impensable qu’un Allemand hérite du trône de Monaco", raconte Louis de Causans, qui explique comment France aurait alors poussé Louis II à adopter Charlotte, une enfant naturelle, née hors-mariage d’une liaison avec la danseuse de cabaret Marie-Juliette Louvet.

C’est une question d’honneur. On a vraiment été effacés de l’histoire, on a été mis de côté
Louis de Causans sur LCI

La branche allemande du duc de Wurtemberg-Urach, scandalisée par cette affaire, décide de renoncer au pouvoir en faveur de la troisième lignée des Chabrillan, les ancêtres de Louis de Causans. Une décision vaine : "sous la pression de la France et du Président Raymond Poincaré, ancien avocat du Rocher", Charlotte est légitimée. En 1919, elle devient ainsi duchesse de Valentinois. Quelques années plus tard, elle met au monde son premier enfant, le prince Rainier III, le père du prince Albert II de Monaco.

Louis de Causans estime que ses ancêtres ont été spoliés du trône qui aurait dû leur échoir si les règles de succession n’avaient pas été modifiées. "La France s’est mêlée de cette histoire et a fait adopter l’enfant naturelle du prince Louis II. Elle avait des intérêts à récupérer Monaco sous son aile", affirme Louis de Causans. "Une escroquerie" contre laquelle son arrière-grand père et son grand-père se sont battus, sans succès. Aujourd’hui, Louis de Causans reprend le flambeau et assure n'avoir "aucune velléité contre" son cousin. "Je ne revendique pas le trône. C’est à la France que je réclame un dédommagement. C’est une question d’honneur. On a vraiment été effacés de l’histoire, on a été mis de côté. Aujourd’hui, il est temps de réparer cette situation qui n’est pas normale".


Mathilde GUÉNÉGUAN et Hélène BONNET

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