Havret et Jacquelin, deux Français à la Ryder Cup : "Immense de vivre ça de l'intérieur"

Propos recueillis par Yohan ROBLIN
Publié le 10 septembre 2018 à 17h08, mis à jour le 24 septembre 2018 à 22h51

Source : Sujet JT LCI

PRÉPARATION - La France sera représentée à la Ryder Cup. À l'instar de Grégory Havret, Raphaël Jacquelin a accepté, à la demande du capitaine Thomas Bjørn lui-même, d'être l'assistant de l'équipe européenne sur le Golf national. LCI a pu parler avec l'ancien numéro 1 français de sa nouvelle casquette avant le grand événement.

Il y aura bien des Français à la Ryder Cup. Du 28 au 30 septembre prochains, l'épreuve-phare du golf prend ses quartiers au Golf national, à Saint-Quentin-en-Yvelines, en région parisienne. Si aucun joueur tricolore n'a été retenu parmi les douze appelés à représenter l'Europe, deux Bleus feront néanmoins partie de l'encadrement de l'équipe européenne. Un choix du capitaine Thomas Bjørn, désireux de donner une touche d'expérience locale à son escouade. 

Conscient que la fibre patriotique aura son importance tant auprès du public que des médias, le Danois a trouvé deux places d'assistants pour Grégory Havret (41 ans) et Raphaël Jacquelin (44 ans). Les deux "vétérans" n'ont aucune sélection en Ryder Cup mais comptent à eux deux plus de 1000 tournois de l'European Tour. À quelques jours de l'événement golfique de cette fin d'année, LCI a pu s'entretenir avec l'ancien numéro 1 français, Raphaël Jacquelin.  

Mon agenda sur la Ryder s'annonce chargé
Raphaël JACQUELIN, assistant-coach de l'équipe européenne

LCI : Avec Grégory Havret, vous allez participer à la Ryder Cup en tant qu'assistants au sein de l'équipe européenne. Comment en êtes-vous arrivés à accepter le poste ? 

Raphaël JACQUELIN : Pour vous la faire courte, Thomas Bjørn (le capitaine du Team Europe, ndlr) nous a contactés Greg (Havret) et moi. C'est une initiative personnelle de sa part. On le connaît depuis très longtemps et on s'entend bien avec lui. Il nous a présentés la chose en nous expliquant qu'il aimerait nous avoir à ses côtés pour cette grande première à Paris. Il nous a dit : "Il est hors de question que vous ne viviez pas la Ryder Cup de l'intérieur", en tant que Français et après tant d'années de présence sur le Tour. À défaut d'être vice-capitaines - nous n'avons pas le palmarès requis pour remplir cette fonction - nous serons ses assistants. Ce n'est pas une récompense, il voulait nous faire plaisir en nous intégrant à l'équipe.

LCI : Expliquez-nous en quoi va consister ce rôle d'assistant-coach ? 

Raphaël JACQUELIN : Que ce soit Greg (Havret) ou moi, ce sera notre première Ryder Cup. Même si on écoute les anciens qui l'ont jouée, on n'a pas encore d'idée précise de ce qu'on va faire. Ce que je sais en revanche, c'est que les capitaines et vice-capitaines ont toujours quelqu'un avec eux pour les conduire d'un endroit à un autre sur le site. Ce sera l'une de nos missions. Grégory sera dans la voiturette de Robert Karlsson, le premier vice-capitaine, et moi dans celle de Bjørn. Je vais devoir l'emmener de partout. Mon agenda sur la Ryder s'annonce chargé entre les conférences de presse et les parties d'entraînement dès le mardi. 

Ensuite, j'imagine qu'on va être sollicité médiatiquement sur le site. Toute la presse française va vouloir que l'on soit auprès d'elle. On nous a aussi parlés de contacts avec la foule. Il va y avoir environ 40% de Français dans le public. L'idée, ce sera d'être présent dès le premier match, le vendredi matin, au départ du n°1. Les spectateurs, les amateurs de golf, vont nous reconnaître. Cela va créer une certaine émulation. Voilà ce que j'ai cru comprendre.

LCI : Au quotidien, vous côtoyez la plupart des golfeurs du Tour européen. Comptez-vous servir de conseil à Thomas Bjørn, notamment dans la composition des duos ? 

Raphaël JACQUELIN : J'espère que nous allons faire partie des discussions, oui. Déjà pour observer comment il va procéder pour former les doubles du vendredi et du samedi. Peut-être même qu'on pourra donner notre avis s'il nous le demande. Après, nous ne sommes pas dupes. On sait que Thomas fait son équipe et que c'est lui qui prendra la décision finale.

Je ne vais pas jouer mais ce sera tout comme
Raphaël JACQUELIN, assistant-coach de l'équipe européenne

LCI : On entend qu'un sentiment prédomine dans votre voix : l'impatience...

Raphaël JACQUELIN : (Il coupe) J'ai hâte d'y être ! Je n'ai aucune idée de ce qui m'attend mais, après avoir vu toutes les photos sur les différents réseaux sociaux, je me dis que ça va être immense de vivre cet événement de l'intérieur. J'ai beau avoir joué tous les Majeurs et participé à toutes les épreuves des Championnats du monde, la Ryder Cup c'est une nouveauté pour moi. Je ne vais pas jouer mais, avec l'ambiance qu'il va y avoir, ce sera tout comme. Les organisateurs attendent quand même 50.000 personnes par jour, sur peu de parties. Ça va faire énormément de bruit. La pression que les joueurs vont avoir au départ du 1, ce sera du jamais vu dans le golf. Même si on a l'habitude de jouer devant du monde sur un Majeur, ce n'est pas pareil d'avoir 10.000 personnes sur le départ du 1, qui ressemble déjà un peu à un stadium.

LCI : Vous avez l'avantage de bien connaître l'Albatros, le lieu choisi pour la Ryder Cup où se joue annuellement l'Open de France. Pouvez-vous nous en parler ?

Raphaël JACQUELIN : C'est un lieu que je connais par cœur (il a disputé 22 Open de France, ndlr). Dans la préparation des roughs (les parties d'herbes hautes non tondues, ndlr) et des fairways (les étendues d'herbes reliant le tee et le green, ndlr), Thomas Bjørn veut quelque chose qui se rapproche de ce qu'on a vu cette année à l'Open de France. Il milite pour des greens (les zones de gazon tondu ras, ndlr) plus lents pour favoriser les Européens, plus habitués que les Américains à s'adapter aux différentes vitesses de jeu. C'est l'avantage quand on joue à domicile. On a la possibilité de préparer le parcours en fonction de son équipe. C'est un peu comme en Coupe Davis quand on choisit la surface. Les roughs devraient être durs, les fairways assez étroits et secs et les greens un peu plus lents. Voilà l'idée de départ, après on verra dès mardi matin sur le terrain si c'est le cas. Thomas est en relation permanente avec le staff du Tour européen et du Golf national pour préparer le parcours comme il le souhaite. 

YOHAN ROBLIN / LCI

LCI : Le golf est un sport individuel, où chacun joue sa carte. Là, le format de la Ryder Cup impose une rigueur collective. Les golfeurs doivent-ils revoir leur façon de jouer ? 

Raphaël JACQUELIN : Du peu d'expérience que j'ai en Match-Play, généralement, on ne change pas grand chose à sa stratégie de jeu. On joue le parcours en fonction de son jeu. On attaque le parcours avec ses moyens, ses qualités et ses défauts. On ne joue pas par rapport à l'autre, contrairement à d'autres sports comme le tennis où on peut s'appuyer sur les faiblesses de l'adversaire pour prendre le dessus. Là, au golf, on fait au mieux selon sa frappe de balle et sa qualité de coups. C'est là que se fait la différence. Ça peut être un problème d'assurer en fonction des résultats de l'autre, même si ça peut aider sur la fin s'il faut libérer les coups.

Il n'y a pas que la forme du moment qui joue
Raphaël JACQUELIN, assistant-coach de l'équipe européenne

LCI : Les Européens apparaissent clairement rajeunis sur cette édition, avec cinq joueurs qui n'ont jamais disputé une Ryder Cup. N'est-ce pas trop d'un seul coup ?

Raphaël JACQUELIN : Vu qu'il y a eu pas mal de rookies dans les huit qualifiés directement, Thomas Bjørn a ajouté de l'expérience avec les quatre picks. Même si, entre guillemets, ce ne sont pas les joueurs les plus en forme du moment, on sait tous que pour gagner une Ryder Cup, l'expérience est déterminante. Il n'y a pas que la forme du moment qui joue pour gagner un match. Tout novice, même en forme, a besoin d'être assisté, notamment dans les doubles, par quelqu'un d'expérience qui le rassure. Depuis 20 ans, à chaque fois que je parle avec des joueurs de Ryder Cup, ils me disent que le plus dur c'est de se mettre dedans. Après, une fois qu'on est lancé, on joue plus ou moins bien, ce sont des choses qu'on a l'habitude de faire. C'est pour ça qu'il a choisi de prendre Garcia, Stenson, Poulter et Casey, des golfeurs qui l'ont déjà jouée et ont emmagasiné suffisamment d'expérience. Ils vont être associés en équipe à des plus jeunes, qui ont besoin de jouer libérés pour être à leur meilleur niveau. 

LCI : Si l'on se réfère aux victoires en Majeurs, en Championnats du monde et au ranking, l'Europe est derrière les États-Unis. Redoutez-vous l'équipe américaine ?

Raphaël JACQUELIN : Sur le papier, il est possible que ce soit l'une des meilleures équipes américaines de tous les temps. Si on regarde le palmarès pur, les États-Unis sont favoris, c'est incontestable. Mais encore une fois c'est du Match-Play et c'est une compétition par équipe. La clé, ce sera de rester au contact pendant les doubles pour ne pas perdre de terrain pour la suite. Généralement, l'équipe européenne le fait très bien. Sur le Match-Play, il n'y a pas besoin d'être en tête tout le temps. De plus, même s'ils ont un palmarès moins important, les favoris européens montrent qu'ils sont là ces dernières semaines. La confrontation promet d'être très serrée. 

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Propos recueillis par Yohan ROBLIN

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